Pauvreté et patriarcat, les mamelles intarissables du consentement des femmes à leur asservissement

Le Kirghizistan est en train de devenir une destination de plus en plus prisée par les clients potentiels de GPA. Comme partout (Russie, Inde, Ukraine, Grèce, Mexique etc.), des clients américains débarquent. On peut se demander pourquoi, étant donné que la GPA est légale dans plusieurs Etats des Etats-Unis. Pourquoi  quitter son pays et aller commander un enfant à l’autre bout de la planète? Peut-être parce que, comme en Inde, l’exploitation des femmes ne pose problème à personne, et leurs droits encore moins.

Sheela Saravanan avait montré dans son livre sur le bio-marché transnational de la GPA en Inde que les principales conditions qui y ont favorisé le développement de ce marché étaient : l’existence de très bonnes compétences et technologies médicales, une législation favorable au marché (c’est à dire aux commanditaires), ainsi qu’une pauvreté structurelle durable et des inégalités entre les femmes et les hommes amenant les femmes à mettre à disposition d’autrui leurs capacités reproductives.

On retrouve ces mêmes conditions au Kirghizistan, comme l’article Surrogate Motherhood Thriving In Kyrgyzstan, Despite Society’s Misgivings le laisse facilement entrevoir.

« Though Kyrgyzstan is not a major « rent-a-womb » destination like India, Ukraine, or Russia, with its strong legal protections, modern medical facilities, and women willing to be surrogate mothers, the baby business is booming. »

Car voici comment il faut comprendre cette énumération :
– « strong legal protections » veut dire que les clients sont surs de récupérer l’enfant pour lequel ils ont payé, la mère étant obligée de le remettre quelle que soit sa souffrance de s’en séparer (la situation d’une mère qui avait refusé de se séparer de l’enfant a conduit à prendre des mesures pour contraindre les mères à abandonner l’enfant).
– « modern medical facilities » – pour la population locale aussi? Non, car le salaire moyen est de 220$ / mois. Comme dans tous les pays, y compris aux Etats-Unis, les compétences et dotations médicales hautement performantes ne profitent qu’aux riches.
– et enfin, et surtout, « women willig to be surrogate mothers » – ce qui veut dire, des femmes pauvres, sans études ni formation, souvent des mères seules, comme c’est le cas de la femme qui témoigne dans cet article.

Si le titre met en avant le fait que la société désapprouve cette pratique, c’est important de comprendre que cela n’a rien à voir avec l’exploitation des femmes, mais avec le contrôle de leur corps et de leurs capacités reproductives par les hommes, car la femme porte un enfant qui n’est pas de son mari. « many Kyrgyz don’t accept the idea of a woman carrying the child of a man who is not her husband« 

Les femmes qui deviennent mères porteuses sont donc contraintes aussi de mentir à leurs familles et à leur entourage, ce qui les isole de ceux et celles qui pourraient les soutenir en cas de besoin, et intensifie leur vulnérabilité, et donc la possibilité de les exploiter.

La pauvreté des femmes est le meilleur moyen de s’assurer qu’elles consentent à tout ce que le marché imagine de leur demander, pour qu’elles puissent nourrir leurs enfants.

via Pauvreté et patriarcat, les mamelles intarissables du consentement des femmes à leur asservissement – Blog du Collectif pour le Respect de la Personne

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