par MD
Introduction.
Depuis huit ans, nous attendions cet heureux temps ; l’année la plus chaude est advenue en 2023. Les causes de ce phénomène sont un sujet complexe qui a déjà agité et continuera à agiter les esprits, les claviers et les écrans : El Nino, aérosols, Hunga-Tonga, CO2, méthane, activité solaire, la lune ? Aux spécialistes de répondre s’ils peuvent. On va simplement, en quelques graphiques, donner une description sommaire de cette situation climatique inédite.
Rappelons au préalable que dans la littérature scientifique les séries de températures sont généralement exprimées en « anomalies », terme équivoque qui désigne les écarts de températures par rapport à des périodes étalons – de trente ans en général – différentes selon les institutions. Cette notion a souvent été expliquée ici, elle est bien connue des lecteurs ; dans les graphiques qui suivent, on a préféré faute de mieux utiliser le terme plus descriptif de températures « relatives » à la période étalon.
Sources disponibles.
Il existe un certain nombre d’institutions scientifiques – centres de recherche ou universités – qui publient des séries de températures couvrant des périmètres plus ou moins étendus. Certains utilisent les réseaux de stations météorologiques terrestres et de bouées océaniques, avec des séries remontant parfois au XIXème siècle, d’autres des satellites et des ballons-sondes mais seulement depuis 1979. On se limitera à la période 1979-2023 de façon à pouvoir comparer les sources entre elles.
Évolution des températures annuelles globales.
Le graphique ci-dessous retrace les mesures provenant de sept de ces institutions qui s’intéressent à l’ensemble du globe et dont les données sont publiques et aisément accessibles.
Les périodes de référence sont différentes mais à une translation près toutes ces courbes sont à peu près analogues et font apparaître en effet un pic remarquable en 2023. Dans la suite, on utilisera seulement les données de quatre centres bien connus :
Deux qui utilisent des relevés terrestres et maritimes.
GISS : NASA, Goddard institute for space studies. Indicateur Gistemp4 (référence 1951-1980).
Hadley Center et CRU. Indicateur Hadcrut5 (référence 1961-1990).
Deux qui interprètent depuis 1979 des mesures composites par satellites et ballons-sondes :
RSS : Remote sensing system. Indicateur RSS-v4 (référence 1979-1998).
UAH : University Alabama Huntsville. Indicateur UAH 6.0 (référence 1991-2020).
Évolution des températures mensuelles globales.
Le graphique ci-dessous retrace les températures mensuelles relevées par ces quatre organismes.
La croissance est irrégulière et se manifeste par des augmentations rapides suivies de « paliers » successifs. Le dernier palier en date avait duré environ huit ans ; le « pic » de 2015-2016 qui avait marqué son origine avait été généralement attribué à un phénomène ENSO (El Niño Southern oscillation) particulièrement intense.
Évolution des températures annuelles par tranches de latitudes.
-Selon Gistemp4 du GISS
Il y a manifestement un gradient de tendances de températures du nord vers le sud. Cela étant, les tranches considérées ne représentent pas la même superficie : les zones circumpolaires (64°-90° N et S) ne représentent chacune que 5% de la surface terrestre. En comparaison, les zones intertropicales (24°N-équ-24°S) figurées en orange représentent 41% de la surface terrestre, d’où leur influence marquée sur la température moyenne du globe.
-Selon RSS
Voici une autre illustration de ce gradient, quoique le découpage ne soit pas le même et qu’il y ait des chevauchements entre les tranches. Rappelons que les zones polaires sont imparfaitement couvertes par ce type de mesure indirecte par satellites.
Évolution des températures annuelles entre océans et continents.
-Selon Hadley Center.
En tendance, les continents se réchauffent plus vite que les océans et par conséquent l’hémisphère nord plus que l’hémisphère sud, ce dernier étant essentiellement maritime comme l’indique le graphique ci-dessous.
Évolution des températures mensuelles des neuf dernières années (2015-2023).
Voyons maintenant le détail des neuf années qui ont été globalement les plus chaudes de l’histoire récente. En températures mensuelles relatives et selon les quatre organismes précédents.
En 2015-2016, la hausse des températures avait commencé à l’automne 2015 et s‘était terminée en mars-avril 2016, culminant en février et n’impactant que partiellement l’année calendaire 2016. En 2023, la hausse avait commencé dès le premier trimestre de l’année et semble avoir culminé entre septembre et novembre, ce qui explique que l’année 2023 ait dépassé le record de 2016 (de 0,17°C environ), et soit devenue ainsi l’année la plus chaude.
Évolution des températures mensuelles par tranches de latitudes
-Selon RSS.
Évolution des températures mensuelles entre continents et océans
-Selon Hadley Center.
Si on compare 2023 avec 2016, il est difficile de démêler quelles parties du monde, terres ou océans, ont pu influer majoritairement sur la température globale. Il faudrait des analyses plus détaillées géographiquement.
Conclusions.
Ces quelques aperçus sans prétention laissent des questions en suspens. La température record de cette année calendaire 2023 résulte-t-elle d’un concours de circonstances fortuit, d’un hasard du calendrier, ou est-elle l’amorce d’une nouvelle augmentation des températures, c’est ce que l’avenir nous dira. Il semble en tous cas que la hausse brusque à partir d’août et surtout de septembre ait surpris les observateurs, notamment parce qu’elle n’était pas en relation avec la concentration en CO2 qui a calmement continué à augmenter à son rythme habituel.
Naturellement, les officines météorologiques du monde entier ont frétillé en chœur, dûment imitées par la multitude médiatique. La COP28, bien dressée, a exprimé (article 5) son « serious concern that 2023 is set to be the warmest year on record and that impacts from climate change are rapidly accelerating ». Au fond, toute la question est là : certes, l’année 2023 a été indéniablement chaude en moyenne, mais quelles ont été les conséquences néfastes de cette conjoncture climatique ? 2023 a connu son lot de catastrophes naturelles et de soubresauts météorologiques, mais rien qui permette de dénoter l’« accélération rapide » de ces « impacts », ni même leur augmentation. Les évènements tragiques qui ont endeuillé le monde sont malheureusement de tout autre nature.