Le Conseil d’État exige la disponibilité du vaccin DTPolio seul pour les bébés
Le ministère de la Santé dispose de 6 mois pour prendre des mesures visant à rendre disponibles les trois seules vaccinations obligatoires en France, sans association avec d’autres.
Les vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP), les seuls obligatoires en France, devront être de nouveau disponibles sans association avec d’autres vaccins non obligatoires, telles que la coqueluche, l’haemophilius influenza (une bactérie à l’origine de certaines méningites) ou encore l’hépatite B… Cette décision rendue publique mercredi 8 février par le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative , fait suite à la requête déposée en février 2016 par quelque 2300 personnes. À l’origine de cette plainte, Augustin de Livois, président d’une association, l’Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN), dont est membre Henri Joyeux, un cancérologue radié du Conseil de l’ordre des médecins en décembre dernier, en raison de ses positions contre la vaccination.
«La loi, qui n’impose que trois obligations de vaccination, implique nécessairement qu’il soit possible de s’y conformer en usant de vaccins qui ne contiennent que ces trois vaccinations», souligne le Conseil d’État dans son communiqué. Or ce vaccin trivalent, faisant l’objet de trois injections groupées avant l’âge de 18 mois, a été suspendu «temporairement» en 2008 par son fabricant Sanofi Pasteur MSD, en accord avec l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, ex-Afssaps). Une décision qui «fait suite à l’augmentation du nombre de signalements de manifestations allergiques observées jusqu’à 24 heures suivant la vaccination depuis le début de l’année 2008 par rapport aux années précédentes», précise l’ANSM.
» La vaccination en 13 questions
L’obligation vaccinale face à ses contractions
Restait alors aux familles à se tourner vers les vaccins tétravalents (DTP + coqueluche), tels que l’Infarixtetra et le Tetravac-acellulaire, et pentavalents (qui vaccinent également contre l’haemophilius influenza), l’Infanrixquinta et le Pentavac. Seulement ceux-ci font l’objet de grosses difficultés d’approvisionnement depuis 2015, voire de rupture de stock. En pratique, seuls les vaccins hexavalents, qui comportent les trois vaccins obligatoires ainsi que les agents protégeant contre la coqueluche, l’haemophilius influenza et l’hépatite B, sont aujourd’hui disponibles, a reconnu le rapporteur public du Conseil d’État le 16 janvier dernier.
Cette incohérence, entre l’obligation d’effectuer seulement le DTP et l’impossibilité de se le procurer, a poussé quelque 2300 plaignants à demander à la ministre de la Santé de prendre les mesures permettant de le rendre disponible. Le 12 février 2016, Marisol Touraine a rejeté cette demande, ce qui a conduit ces personnes à se tourner vers le Conseil d’État.
Le ministère de la Santé, qui dispose désormais de six mois pour rendre le vaccin DTP disponible, a indiqué mercredi avoir «saisi immédiatement ses services et l’ANSM pour que l’État puisse mettre en oeuvre cette décision dans le délai imparti». Il a également rappelé qu’un kit spécial ne contenant que les vaccins obligatoires est disponible gratuitement sur demande du médecin prescripteur. Plus de 2300 demandes auraient ainsi été satisfaites en 2016 selon le ministère. Dans les faits et faute d’une production suffisante, seuls les enfants présentant des contre-indications aux autres vaccins peuvent en bénéficier.
Des moyens d’action laissés en sommeil
Or le ministère de la Santé dispose bien de moyens permettant de garantir la disponibilité de ces vaccins. D’abord, il peut sanctionner les laboratoires et entreprises ne respectant pas «leur obligation d’élaborer et de mettre en œuvre un plan de gestion des pénuries de vaccins». Il peut également demander au ministre chargé de la propriété intellectuelle de soumettre le brevet d’un médicament au régime de la licence d’office afin d’assurer sa mise à disposition en quantité suffisante. Enfin, il peut saisir l’Agence nationale de santé publique, qui a le pouvoir de procéder à l’acquisition la fabrication, l’importation et la distribution de médicaments pour faire face à leur commercialisation ou production insuffisante.
En revanche, le Conseil d’État a rejeté l’argumentation des plaignants sur les «risques allégués des vaccinations non obligatoires», soulignant qu’«aucun élément sérieux n’est apporté sur l’existence d’un risque d’atteinte à l’intégrité de la personne et de mise en danger d’autrui». Il rappelle par ailleurs que ces vaccinations complémentaires sont recommandées par le Haut Conseil de la Santé Publique.
Au premier semestre 2015, l’Institut de veille sanitaire (InVS) avait observé une baisse de 5% de la vaccination des nourrissons par rapport au premier semestre 2014. Cependant, cette diminution concernait tant les vaccins combinés que le Prevenar©, un vaccin contre les infections invasives à pneumocoque, pour lequel il n’y a pas eu de difficultés d’approvisionnement en 2015. Selon l’InVS, ce phénomène «plaide en faveur de l’hypothèse d’un accroissement de l’hésitation vaccinale» et «constitue un résultat préoccupant.»
En France, une personne qui n’assurerait pas la vaccination obligatoire de son enfant peut être punie de 1500 euros. En cas de refus de faire vacciner son enfant ou d’entrave à la vaccination, celle-ci peut être punie de 6 mois de prison et de 3 750 euros d’amende, selon le Code de la Santé Publique.
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