Affaire Rugy : le précédent Macron

Les dîners polémiques organisés par François de Rugy alors qu’il était président de l’Assemblée nationale ont fait ressurgir les souvenirs de ceux organisés par l’ancien ministre de l’Économie, devenu président de la République.

 

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Les agapes de l’ancien cadre d’EELV – qui, selon une source proche de l’enquête menée par l’Assemblée nationale, relevaient bien du cadre professionnel – ont fait ressortir du placard quelques fantômes du passé. À une époque pas si lointaine, Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie (2014-2016), a lui aussi multiplié les dîners et les rencontres à Bercy. À en croire les observateurs de la vie politique et ses adversaires, ces réceptions lui ont permis de se constituer un solide réseau qui a pu lui être utile pour la suite de sa carrière politique. « Pour François de Rugy, on parle d’une dizaine de dîners entre octobre 2017 et juin 2018 mais du côté d’Emmanuel Macron, c’était quasiment tous les soirs !, s’exclame Frédéric Says. C’était très très soutenu. »

Le journaliste avait, à l’occasion de la sortie de son livre, révélé qu’« en seulement huit mois, jusqu’à sa démission en août [2016], Emmanuel Macron [avait] utilisé à lui seul 80 % de l’enveloppe annuelle des frais de représentation accordée à son ministère par le Budget ». À l’époque, le mouvement En marche !, lancé par Emmanuel Macron, avait immédiatement démenti ces accusations. « Aucun centime du budget du ministère de l’Économie (…) n’a jamais été utilisé pour En marche ! Toute affirmation du contraire est purement et simplement diffamatoire », pouvait-on lire dans un communiqué. Interrogé de nouveau sur le sujet par franceinfo, l’Élysée n’a pas donné suite à nos sollicitations.

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Les peoples ne sont pas les seuls à fréquenter Emmanuel Macron. Ce dernier reçoit aussi, à dîner ou non, des acteurs de la vie politique et publique qui, sur le papier, n’ont pas grand chose à voir avec ses fonctions de ministre de l’Économie. Ainsi, écrit L’Express en janvier 2018, Emmanuel Macron s’entretient à Bercy avec des intellectuels qui pensent le spirituel et la laïcité, ou encore avec des représentants des cultes. Dalil Boubakeur, alors président du Conseil français du culte musulman, se souvient avoir dressé au futur chef de l’État « un panorama depuis une trentaine d’années des musulmans en France » et avoir trouvé une oreille très attentive auprès du ministre. L’abbé Pierre-Hervé Grosjean, fondateur du Cercle Léon-XIII, est lui reçu à sa demande avec plusieurs prêtres pour un petit-déjeuner à Bercy. « On avait échangé sur les grands sujets universels et sur la notion de bien commun », se rappelle-t-il, soulignant que d’« autres ministres n’avaient pas le temps de le recevoir ». Au fur et à mesure que grandit l’ambition d’Emmanuel Macron, les échanges se font plus intenses et, surtout, plus politiques. Le futur candidat absorbe les conseils, remarques et notes que lui font passer intellectuels et chercheurs. Le politologue Stéphane Rozès est par exemple reçu un samedi matin à Bercy « deux, trois mois avant le départ d’Emmanuel Macron  ». « Cet échange n’était pas dans le cadre d’une mission professionnelle pour Bercy mais une discussion de visiteur du samedi », tient-il à préciser. Le sujet de conversation ? « Nous avons parlé de la dépression française, de ses raisons profondes. »

Dans cette lignée, l’ancienne ministre Corinne Lepage est ainsi conviée entre juin et juillet 2016 au ministère où ils « abordent beaucoup de sujets ». Dans l’optique de constituer sa future équipe ? […] L’ex-ministre ne donne pas suite immédiatement et attendra janvier 2017 pour rallier la campagne du futur président. D’autres au contraire se lanceront dans l’aventure macronienne dès ses débuts.

Était-ce pour autant le rôle d’Emmanuel Macron de recevoir à Bercy autant de personnalités de tous bords et tous milieux ? À l’époque, En marche ! avait présenté le même argument que celui avancé par François de Rugy pour justifier la qualité des personnes invitées à ses dîners.

[…] Cette pratique des dîners est très fréquente dans toutes les institutions de la République, nous confirment plusieurs journalistes, personnalités et anciens ministres contactés par franceinfo. Mais rien dans la réglementation ne permet de contrôler la nature des dépenses effectuées, les responsables politiques doivent seulement s’astreindre à ne pas dépasser un certain budget. […]

Après l’affaire de Rugy, ces dîners sont-ils vus sous un angle différent par les anciens collègues d’Emmanuel Macron au ministère ? Michel Sapin défend l’idée que le locataire de Bercy puisse y recevoir des artistes, l’économie du spectacle pouvant faire partie des attributions du ministre. Il regrette plutôt de ne pas avoir détecté l’ambition d’Emmanuel Macron et de ne pas avoir vu dans ces dîners « un signe de plus ». Christian Eckert a, lui, un jugement plus dur sur ces agapes. « Je suis pour respecter la liberté du ministre mais là, clairement, on est dans des excès », soutient-il. Il n’est pas le seul à le penser. « Ceux qui essayent de justifier ces dîners, en disant qu’expliciter les reformes auprès des personnalités influentes cela peut être le rôle d’un ministre, ont une conception extensive de ce rôle », pointe Frédéric Says. Même analyse pour Marc Endeweld, auteur de deux ouvrages [1] sur le chef de l’État : « Emmanuel Macron a totalement maximisé ses frais de représentation et utiliser sa position de ministre de l’Économie pour son ambition personnelle. C’est à Bercy qu’il a fait son réseautage. »

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Après son élection en tant que Président, Emmanuel Macron a continué à claquer « un pognon de dingue », nous apprend encore francetvinfo :

 

L’Élysée a dépassé son budget initial de plus de 5 millions d’euros en 2018, selon un rapport de la Cour des comptes

 

Les dépenses de l’Élysée en 2018 ont dépassé de 5,67 millions d’euros le budget prévu pour l’année, révèle un rapport annuel de la Cour des comptes publié jeudi 18 juillet.

 

L’explication : « Un accroissement de l’activité de la présidence », affirme le rapport, pour ce qui était la première année complète d’Emmanuel Macron au pouvoir.

Au total, les charges de la présidence se sont élevées à 108,88 millions d’euros, en hausse de 6,6% par rapport à 2017. Une hausse qui provient essentiellement des « charges de personnel et de fonctionnement courant ».

Le budget avait déjà été dépassé en 2017…

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Notes

[1] Le Grand Manipulateur. Les réseaux secrets de Macron (Stock, 2019) et L’Ambigu Monsieur Macron (Points Seuil, 2018).

 

via Affaire Rugy : le précédent Macron – Egalite et Réconciliation

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