Destruction du Code du travail : le « CDI » de projet

Source : France TV Info

Le contenu de la future réforme du travail se précise. Selon Le Monde, le projet de loi d’habilitation, qui permettra au gouvernement de réformer le Code du travail par ordonnances, contient neuf articles. Parmi ceux-ci, le gouvernement planche sur un recours élargi au CDI de projet, un dispositif à mi-chemin entre le contrat à durée indéterminée et l’intérim. Un « instrument intéressant », a décrit le Premier ministre, Edouard Philippe, mardi 20 juin, sur BFMTV. Car « cela maintient le CDI dans la norme. » 

Principalement utilisé dans le secteur du bâtiment, le CDI de projet permet une certaine souplesse à l’employeur tout en préservant des garde-fous pour le salarié. Que prévoit-il précisément ? Par qui est-il utilisé ? Franceinfo fait le point.

De quoi s’agit-il ?

Sans date de fin précise, contrairement à un contrat à durée déterminée (CDD), le CDI de projet a vocation à s’arrêter au terme de la mission pour laquelle le salarié est engagé. Ce qui n’est pas le cas d’un CDI classique, prévu généralement pour durer. Il ne prévoit aucune durée de travail précise, mais comporte une clause de rupture prédéterminée : la fin du projet sur lequel le salarié a travaillé, développe Le Monde

« C’est courant dans le monde du BTP, explique Paul-Henri Antonmattei, professeur à l’université Montpellier-I au quotidien. Lorsque le chantier s’achève, l’employeur doit tout d’abord rechercher à reclasser le salarié signataire d’un tel contrat ; s’il n’y parvient pas, la relation de travail est rompue. » C’est donc la fin du chantier qui constitue la cause du licenciement. Le salarié est ensuite licencié pour motif personnel. Le secteur de l’informatique et du numérique, qui repose énormément sur les projets, est particulièrement intéressé par ce type de contrat, précise Europe 1.

Pourquoi est-il utilisé ?

A travers le CDI de projet, l’employeur peut ajuster la durée effective du contrat à ses besoins. Dans le secteur du bâtiment, il permet de s’adapter aux éventuels contretemps (retard de livraison, aléas climatiques…). « Il (l’employeur) y recourt lorsqu’il n’a pas le personnel suffisant en interne pour mener à bien un chantier. C’est un outil auquel les entreprises sont très attachées. Les PME comme les grands groupes l’utilisent de façon assez importante », explique-t-on à la direction des affaires sociales de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), à l’AFP.

A travers ce contrat, l’employeur limite aussi les risques de contentieux aux prud’hommes. Puisque le motif de licenciement (la fin de la mission) est inscrit dès le départ, « les risques de se voir infliger des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont atténués », détaille Le Figaro. Le licenciement doit toutefois impérativement intervenir à la fin effective du chantier. L’employeur ne peut pas licencier un salarié, même si sa mission est terminée, dès lors que d’autres continuent de travailler sur le chantier.

Concernant le salarié, si la loi ne prévoit rien, la convention collective du bâtiment a mis en place des dispositions en sa faveur. L’employeur a l’obligation de chercher à le recaser sur un autre chantier. Si le salarié est licencié, il bénéficie pendant un an d’une priorité pour être réembauché.

Qu’en pensent les partenaires sociaux ?

L’extension du CDI de projet à d’autres secteurs que le bâtiment est une revendication de longue date du patronat. Au printemps 2000, le Medef avait déjà proposé un « contrat de projet » ou de « mission » libéré des 18 mois maximum que permet le CDD, pour le « lancement d’un produit, le démarrage d’une nouvelle activité ou l’implantation d’une nouvelle unité », décrit Libération.

Lors des réformes du travail de 2013 et 2015, le Medef a systématiquement milité pour la création de contrats de projet. En 2013, l’organisation patronale a proposé un CDI de projet de 9 mois minimum, mais cette mesure avait été retirée au dernier moment du projet d’accord, à la demande des syndicats.

Quatre ans plus tard, la CGT continue de s’opposer à « l’instauration de contrats de mission, de projet ou de chantier, pour l’ensemble des salariés d’un secteur d’activité », y voyant « la fin du CDI pour toutes et tous ». La « généralisation » du CDI de chantier est également une « ligne rouge » pour FO qui dénonce une « précarité non compensée par une prime quelconque ».

via Réforme du Code du travail : trois questions sur le CDI de projet

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