Perturbateurs endocriniens dans les préservatifs, phtalates dans les sextoys…

Plusieurs études montrent la présence de perturbateurs endocriniens dans les préservatifs, les sextoys et les lubrifiants. Quels sont les risques pour notre ? Existe-t-il des alternatives ? Franceinfo vous apporte des éléments de réponses.

Le scénario est peut-être déjà prévu : un bon restaurant, une ambiance tamisée… et une partie de jambes en l’air. La Saint-Valentin, mercredi 14 février, s’annonce sous ses meilleurs auspices. Vraiment ? A cette occasion, franceinfo a voulu en savoir plus sur la composition des produits en contact avec notre intimité, comme les préservatifs, les lubrifiants ou encore les sextoys. Sont-ils sûrs pour notre ? Contiennent-ils des perturbateurs endocriniens, comme c’est le cas pour certains produits de notre alimentation, nos vêtements ou nos cosmétiques ? Et, si oui, comment faire pour passer tout de même un bon moment ? Éléments de réponse.

Quels ingrédients retrouve-t-on dans nos produits sexuels ?

L’opacité pour les préservatifs et les lubrifiants. Difficile de répondre à la question, et pour cause : les lubrifiants et les préservatifs sont considérés comme des dispositifs médicaux. Par conséquent, “les fabricants n’ont pas d’obligation réglementaire de présenter leur composition exhaustive”, explique Cécile Vaugelade, du G-MED (groupement pour l’évaluation des dispositifs médicaux) sur le site Le Lanceur. En 2017, ce dernier a fait analyser un préservatif de la marque Durex, présenté comme le plus vendu en . Et les résultats sont peu rassurants : on retrouve en effet du cyclotrisiloxane parmi les ingrédients, mais aussi du dodécane, du pentadécane et de l’octadécane, qui sont des hydrocarbures. Ces molécules sont suspectées d’être toxiques pour la reproduction humaine.

En 2014, l’association Générations Cobayes s’est associée au Réseau pour lancer une pétition afin de réclamer aux industriels la transparence sur l’affichage des composants et sensibiliser le grand public. Ils affirment n’avoir reçu aucune réponse des fabricants.

Des phtalates et du chlore dans les sextoys. Du côté des jouets sexuels, le tableau n’est guère plus reluisant. A tel point qu’en , des députés écologistes ont saisi leur gouvernement au sujet de la composition des vibromasseurs ou des boules de geisha, souvent en plastique, indique Der Spiegel (en anglais). Plusieurs études, dont une menée par Greenpeace (en anglais) en 2006, prouvent la présence de phtalates dans ces jouets. Ces substances chimiques, utilisées pour assouplir et adoucir le plastique, sont considérées comme toxiques pour la reproduction humaine.

Une étude menée, en 2013, par 60 millions de consommateurs sur une quinzaine sextoys s’était, elle, montrée plutôt rassurante sur le risque pour la santé, même si le magazine alertait sur “certains des phtalates utilisés en substitution dans les plastifiants”. Plus récemment, une thèse, menée par une étudiante en sciences de la santé à l’université du Nevada, a aussi mis en évidence la présence de chlore dans les sextoys en plastique, rapporte Glamour (en anglais).

Quels sont les risques pour la santé ?

Même si “le message fondamental est ‘protégez-vous’”, les résultats récoltés par Le Lanceur sur le préservatif testé sont “préoccupants”, relève Charles Sultan, professeur d’endocrinologie pédiatrique du CHU de Montpellier, interrogé par franceinfo. “Il s’agit de perturbateurs endocriniens extrêmement nocifs dérivés du , qui plus est en contact avec des muqueuses très absorbantes”, explique-t-il, en soulignant l’effet “d’accumulation”.

Même s’il s’agit de quantités infinitésimales, avec les perturbateurs endocriniens, la dose ne fait pas le poison.Charles Sultanà franceinfo

“Le problème c’est l’effet cocktail de tous les perturbateurs avec lesquels nous sommes en contact”, abonde Emma Luche, co-directrice de Générations Cobayes, contactée par franceinfo. Après, tout dépend de la fréquence de l’usage… Ce n’est pas la même chose si la personne porte un préservatif trois fois par jour ou une fois par semaine”, nuance de son côté Pascale Mirakian, gynécologue-endocrinologue à Lyon, contactée par franceinfo.

En ce qui concerne les phtalates retrouvés dans les sextoys, la chercheuse Amanda Morgan, qui a mené l’étude publiée dans Glamour,rappelle qu’“ils peuvent causer des malformations congénitales, ou altérer le fonctionnement du foie ou des reins”. Quant au chlore, il “peut causer des irritations, des brûlures” et “c’est aussi un stérilisant”, poursuit-elle.

Pourquoi n’y a-t-il pas de réglementation ? 

“C’est vrai que ces produits ne font pas partie des recommandations, car le message de prévention prime”, avance la gynécologue Pascale Mirakian. Le peu d’études sur le sujet tient aussi au thème abordé. “Dès qu’on est dans la sexualité, il y a une chape de plomb”, observe Patrick Pruvot, PDG de la chaîne de magasins “Passage du désir”, contacté par franceinfo. L’association Générations Cobayes regrette que le sujet soit “tabou”. ” Le sextoy est un objet de plaisir mais pas seulement. On oublie aussi qu’il peut avoir une utilisation médicale, comme la rééducation pelvienne ou dans des cas de vaginisme”, soulève Emma Luche.

Patrick Pruvot dénonce le manque de réglementation en la matière : “Les phtalates sont interdits dans les capuchons d’un bic ou pour les briquets, mais ne sont pas interdits dans les sextoys. C’est d’une hypocrisie… En , le plaisir est puni.” Au nom du principe de précaution, l’ a en effet limité, en 2005, à 0,1% la teneur de six phtalates dans les jouets que les enfants de moins de trois ans peuvent téter ou mâchouiller. Mais cette restriction ne concerne pas les jouets pour adultes. De plus, comme “la réglementation sur les perturbateurs endocriniens est encore floue (…) plein de produits continuent d’y échapper”, se désole Emma Luche.

Et les industriels n’apportent pas de réponses satisfaisantes. “Nous voulons être le plus transparent possible avec nos clients. Mais en ce qui concerne les parabens, nous n’avons pas le choix. On essaye néanmoins d’en limiter les concentrations”, assure au journal belge DH, Didier Moureau, directeur de Distrimarks qui commercialise le lubrifiant Feminine. “On ne met rien parce que nous n’y sommes pas obligés. Mais on peut donner les compositions ponctuellement en cas de problème pour un de nos clients”, assure de son côté Durex au même journal. Contactés par franceinfo, ni Manix, ni Intimy n’ont souhaité communiquer sur la composition de leurs produits.

Que peut-on faire pour passer une bonne Saint-Valentin ?

Pour les préservatifs. Pas question de laisser la capote de côté : il faut bien sûr continuer de se protéger. Néanmoins, s’il n’y a pas de “labels” qui garantissent des produits sans perturbateurs endocriniens, certaines marques se sont lancées dans des préservatifs avec des composants triés sur le volet. C’est le cas de la société Green Condom. Les sociétés “vegan” Glyde, Sir Richard, Sustain, RFSU commercialisent aussi des préservatifs en latex naturel, qu’elles présentent comme sans , sans paraben, sans additifs.

Pour les sextoys. A travers, la campagne “eco-orgasme”, l’association Générations Cobayes sensibilise les 18-35 ans sur le rapport entre santé et et propose des solutions. “Il existe de plus en plus de sextoys en plastique sans phtalates. Il est aussi possible de se tourner vers des sextoys en silicone, en céramique, en verre ou encore en bois”, précise Emma Luche. Si vous restez accro au plastique, vous pouvez vérifier que le produit comporte bien la mention “phtalate free”. “Beaucoup de produits américains ou chinois exportent des sextoys avec des phtalates, mais il y a des marques suédoises ou allemandes qui sont plus exigeantes”, relève Patrick Pruvot, PDG de la chaîne “Passage du désir”.

Pour les lubrifiants. Là aussi, existent des produits exempts de paraben. Les marques RFSU, Fairsquared, Greenrepublic, Eco-Sapiens en proposent et vous pouvez les trouver en ligne. Ces lubrifiants n’endommagent pas les préservatifs. Vous pouvez aussi opter pour des lubrifiants “maison”, type huile d’amande douce bio. Mais attention, ils ne font pas bon ménage avec les préservatifs.

 

Source : francetvinfo

via Perturbateurs endocriniens dans les préservatifs, phtalates dans les sextoys… – Meta TV

Print Friendly, PDF & Email

Laisser un commentaire