Yann Barthès : icône bobo de l’« infotainment »

« Je ne pense pas qu’on soit méchants. »

Avec sa belle gueule et sa décontraction corrosive, Yann Barthès est devenu en quelques années le gendre idéal de la mère de famille conseillère déco dans le Marais, ou son fantasme télé le plus avouable. Longtemps animateur du « Petit Journal » sur Canal+, moment clé de l’émission phare de la chaîne branchée (« Le Grand Journal » de Michel Denisot), ce presque quadra y a poussé au plus loin le concept de l’« infotainment », forme divertissante de l’actualité, quitte à essuyer régulièrement les critiques de ses cibles lui reprochant une malhonnêteté systématique.

Il faut dire que l’ambiguïté du concept éloigne très naturellement de la rigueur et de la probité journalistiques. Mais s’il est fort décrié en tant que journaliste, il triomphe en revanche en tant qu’icône, au point que des rumeurs circulent sans arrêt dans les magazines people au sujet d’une vie privée pourtant tenue secrète, prouvant, si besoin l’était, son très haut degré de sex appeal. Cynisme du spectaculaire de gauche ? Peut-être… Ou bien double vocation d’un présentateur qui démarre peu à peu une seconde carrière d’acteur.

Il est né en octobre 1974 à Chambéry.

Formation universitaire

Yann Barthès a été élève au lycée Vaugelas (Chambéry). Son Bac en poche, il passe un DEUG d’anglais à l’Université de Savoie avant de s’orienter vers le journalisme par le biais de l’ISIC (Institut des sciences de l’information et de la communication) à l’IUP de Bordeaux, qu’il fréquente de 1995 à 1998.

Parcours professionnel

Barthès débute en 1998 sa lente et sûre ascension à Canal+. D’abord stagiaire chargé des revues de presse, il s’occupe des invités de « +Clair » à partir de 2002, une émission consacrée aux médias et présentée par Daphné Roulier. Il commence au « Grand Journal » de Michel Denisot en 2004, présentant au début les rubriques du « Petit Journal People » et du « Petit Journal Actu », seulement par l’entremise d’une voix off, avant d’apparaître sur le plateau de l’émission à compter du 3 septembre 2007, pour livrer déjà une version humoristique et corrosive de l’actualité. En septembre 2010, le « Petit Journal People » disparaît, absorbé par le « Petit Journal Actu » qui devient alors le « Petit Journal », émission diffusée du lundi au jeudi à 19h45, en fin de première partie du « Grand Journal ». Entre temps, Yann Barthès a reçu le prix du meilleur journaliste au trophée des jeunes talents 2009. Il crée en 2011, en collaboration avec Laurent Bon (producteur éditorial du « Grand Journal »), la société de production Bangumi qui produit dès lors « Le Petit Journal » indépendamment de KM Productions (société de Renaud Le Van Kim et Michel Denisot).

Le 31 août 2011, le présentateur a sa marionnette aux « Guignols de l’info », et au mois de septembre de cette même année, une nouvelle formule du « Petit Journal » est lancée : plus longue (elle dure désormais 18 minutes), elle est aussi diffusée un jour de plus (le vendredi). En 2012, le journaliste star amorce une discrète carrière parallèle d’acteur, apparaissant dans le court métrage Arthur Flèche de Samuel Hercule (lequel est diffusé dans le cadre des « Programmes courts » de Canal+), puis dans un épisode de la mini-série à succès Bref. Mais en 2014, c’est en tant que personnage principal qu’il apparaîtra dans le long métrage La Main sur le cœur, que s’apprête à réaliser le même Samuel Hercule.

Il produit également depuis septembre 2012 l’émission « Supplément », diffusée chaque week-end sur Canal et animée par Maïtena Biraben. Le succès retentissant du « Petit Journal » ne va pas cependant sans un certain nombre de critiques qui se sont multipliées ces derniers temps. Le concept de l’émission procédant essentiellement par montages et dérision, la caricature, le recyclage de propos tronqués et la malhonnêteté sont des écueils fréquents. Ainsi, des internautes dénoncent, en octobre 2012, la mauvaise foi des équipes du « Petit Journal » suite à un éreintage du premier ministre Jean-Marc Ayrault, deux des conseillers de ce dernier allant jusqu’à accuser l’émission de « pipeautage » via Twitter. François Bayrou, lui, parle de « manipulation », quant à Jean-Luc Mélenchon, il a préféré user de l’épithète inusable de « fachos » pour qualifier les membres de l’équipe du « Petit Journal ». « Ce ne sont pas des journalistes », a déclaré le trublion d’extrême gauche, une opinion que semble, cela dit, partager la CCIJP (Commission de la Carte d’Identité des Journalistes Professionnels), laquelle a carrément refusé d’attribuer leurs cartes de presse à six membres de l’équipe du « Petit Journal ».

Mais c’est également l’actrice Véronique Genest, qui se plaint de Yann Barthès, l’animateur ayant selon elle contribuée à lui forger une image de “raciste” après ses déclarations sur l’Islam. Quant à Cécile Duflot, la ministre du logement, elle a dénoncé, lors de son passage à « Arrêt sur Image » sur France 5, le 31 octobre 2012, une « émission manipulatrice ». L’inoxydable chanteuse Mireille Mathieu est allée pour sa part jusqu’à assigner en justice la société de production du « Petit Journal », pour « dénigrement » et « diffamation », après des propos tronqués qui auraient dénaturé sa position au sujet du groupe russe Pussy Riot.

Le 9 mai 2016, Yann Barthès annonce qu’il quitte l’émission Le Petit Journal et, par la même occasion, la chaîne Canal+ à la fin de la saison 2015-2016 ; il est remplacé par Cyrille Eldin. Ce dernier a vu ses audiences dévisser – du reste Yann Barthès lui a bien savonné la planche en le traitant notamment, en janvier 2017, de « collègue un peu relou, même tota­le­ment relou, miso­gyne, un peu violent et mal poli ».

À partir de septembre 2016, il anime l’émission Quotidien sur TMC avec une grande partie de son ancienne équipe présente sur Canal+, dont Martin Weill, Hugo Clément, Camille Crosnier, Panayotis Pascot et le duo Éric et Quentin, mais aussi de nouveaux chroniqueurs comme Vincent Dedienne, et depuis juin 2017 le rédacteur en chef du site d’information médias Puremedias.com Julien Bellver. En décembre 2016, il remporte, avec son équipe, le prix du meilleur magazine télé 2016 pour son émission Quotidien lors de la cérémonie des Étoiles du Parisien. Il se retrouve aussi dans une bataille rangée pour les audiences contre Touche pas à mon poste, l’émission phare de Cyril Hanouna sur C8 ; Yann Barthès remporte fréquemment cette course à l’audience, et donc aux revenus publicitaires.

Il s’est aussi illustré pendant la campagne présidentielle de 2017 en se payant Nicolas Dupont-Aignan, qui a été défendu par… Libération.

Combien il gagne

Paris Match et Capital dévoilent les salaires des animateurs et des acteurs français les plus connus en 2016 ; parmi eux, Yann Barthès, qui touche 27 millions d’euros par an, derrière Nagui (32 millions) et Hanouna (50 millions).

Publications

Collaborations

– Apparition dans le court métrage Arthur Flèche de Samuel Hercule (Sombrero Films) 2012.

– Apparition dans un épisode de Bref, 2012.

– Rôle principal dans La Main sur le cœur de Samuel Hercule, annoncé pour 2014.

– Avec le producteur Laurent Bon, il détient une société de production, Bangumi, qui produit notamment le reportage engagé Les Pensées de Paul, diffusé en octobre 2015 sur Canal+, et la série documentaire Scandales de la mode, diffusée en juillet 2016 sur Arte, mais aussi l’émission Quotidien, qui est produite par cette société. Par ailleurs, il participe aussi à la production de Stupéfiant!, un magazine culturel diffusé sur France 2 et présenté par Léa Salamé tous les lundis en deuxième partie de soirée depuis septembre 2016

Il l’a dit

« Je ne pense pas qu’on soit méchants et que Canal nous vende comme tel. La mise en scène est effectivement suggestive, mais on n’insulte personne », Toute la télé, 2008.

« On est plutôt dans la désacralisation de l’aura d’un ministre ou d’un people. Et ces gens-là nous aiment plutôt bien. Certains nous appellent parfois. Ils préfèrent exister à travers ce genre de traitement que ne pas exister du tout », La Libre Belgique, octobre 2008.

Nébuleuse

Michel Denisot ; Arianne Massenet ; Bernard-Henri Lévy ; Daphné Roulier.

Ils ont dit

« Ce n’est pas la première fois que la mention du couple présidentiel dans Quotidien ou par Yann Barthès provoque des tensions. Exemple au lendemain du premier tour de la présidentielle lorsqu’un reporter demande à Emmanuel Macron : « La Rotonde, c’est votre Fouquet’s ? » En représailles, affirmait M Le Monde, « l’émission aurait reçu des menaces de boycott et des pressions directes » », ActuOrange, 26 juin 2017.

« Diffi­cile de trou­ver deux émis­sions plus oppo­sées – à tous les niveaux – que Touche pas à mon poste et Quoti­dien. Portés respec­ti­ve­ment par Cyril Hanouna et Yann Barthès, les deux talk-shows diffu­sés tous les jours en access prime time se livrent une bataille sans merci dans la guerre des audiences, et à ce petit jeu là, c’est Yann Barthès qui gagne » Voici, 29 mars 2017.

« Le plus beau, c’est cette question. « Où sera placé Dupont-Aignan ? Vous pouvez me montrer sa place ? » C’est une blague. Les initiés comprendront. Nicolas Dupont-Aignan, candidat souverainiste de droite, n’est pas invité. L’avant-veille, au 20 heures de TF1, il a même spectaculairement quitté le plateau pour protester contre cette non-invitation au débat des  »grands » », Libération, 26 mars 2017.

« Yann Barthès n’en a pas fini avec Nicolas Dupont-Aignan. A peine a-t-il renvoyé les gazelles Bouleau et Coudray à la préparation de la fiesta qu’il revient régler son compte au souverainiste, en disséquant plan par plan la fameuse séquence « Dupont-Aignan quitte le 20 heures ». Tout y passe. Le sourire du candidat : « Si vous arrivez chez les gens en sachant que vous allez vous barrer, vous faites un sourire comme ça ?«  Rires du public. Dupont-Aignan, rediffusé par Barthès : « Nous sommes dans une fausse démocratie« . Re-rires. « L’élection n’a jamais été à ce point faussée« . Rires, rires, rires », ibid.

« En s’achetant les services de Barthès, le groupe TF1 a construit une mécanique implacable, et totalitaire. Non seulement la chaîne amirale contrôle le portail de la notoriété nationale. Mais, dans un effet « deuxième lame », Barthès s’emploie à enterrer les réprouvés sous le poids du ridicule. Rien à dire, c’est une belle machine. On parle beaucoup d’Orwell, ces temps-ci. George Orwell avait inventé le quart d’heure de la haine. Yann Barthès fait mieux : les cinq minutes du ridicule », ibid.

« Sous ses abords de rebelle branché, il est d’un total conformisme. On le voit dans ses interviews, bien souvent complaisantes. Celle de BHL au moment de la sortie de son « documentaire » Le Serment de Tobrouk, fut un modèle du genre. A ce titre, Yann Barthès présente une vraie filiation avec Michel Denisot », Luc Chatel (le journaliste, pas le ministre UMP), Télérama

« « Le petit journal », je ne dirais pas que c’est l’ENA, mais c’est un bon lieu de commentaire politique », Bernard-Henri Lévy.

« Yann Barthès est quand même bien encadré, on lui file une entrée et une sortie. Michel Denisot, que je connais bien, vérifie sûrement que Barthès n’a pas un pétard qui va exploser toute la baraque », Philippe Gildas, Rue89, octobre 2010

« Yann Barthès est à la politique ce que David Guetta est à la musique : un habile mixeur », Sébastien Le Fol, août 2011, Figaro Blog

via Yann Barthès – Ojim.fr

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