Covid-19 : où sont passés les AVC ?

Article de France Inter du 7 Avril 2020

Où sont passés les accidents vasculaires cérébraux ? Les neurologues s’interrogent. Depuis l’épidémie de Covid, les cas, pourtant nombreux en temps normal, sont devenus rares. Et il en va de même pour les infarctus.

Des accidents vasculaires cérébraux, il s’en produit, en temps normal, quelque 12 000 par an, un AVC toutes les 4 minutes en France. Et pourtant, depuis 3 semaines, on ne les voit plus. Idem pour les infarctus du myocarde (10 000 par an), qui semblent curieusement eux aussi devenus rares depuis la mi-mars. La société française de cardiologie et la société française de neurologie s’en sont émues lundi, elles ont ensemble diffusé un communiqué à l’adresse des patients, les exhortant à consulter de toute urgence en cas de symptômes.

Le phénomène étonne et inquiète les professionnels de santé. Pourquoi cette disparition soudaine ? On peut comprendre qu’en période de confinement, la traumatologie constate une baisse de ses activités : il y a moins de circulation automobile, moins de sorties, donc moins d’accidents et moins de chutes. Mais les AVC et infarctus n’ont aucune raison d’avoir disparu. Il peut donc s’agir d’autocensure (les personnes hésitent peut-être à déranger le 15 ou ils craignent d’attraper le Covid en allant aux urgences), ou de délai d’attente trop long quand on appelle le 15 déjà surchargé, ou encore de négligence des symptômes ?

« C’est une maladie qui a tué toutes les autres »

Dans les hôpitaux parisiens, en tout cas, on constate bel et bien pour les AVC une diminution des cas d’admissions aux urgences d’environ 50%. À l’hôpital du Kremlin Bicêtre, en région parisienne, le Professeur Laurent Spelle reconnait qu’il est un peu au chômage technique depuis trois semaines. Il dirige le service de neuro-radiologie interventionnelle (en gros, en passant par l’aine, il enlève les caillots qui bouchent l’artère cérébrale en cas d’AVC), et c’est un fait : son service est beaucoup moins occupé depuis la mi-mars. Pas une seule intervention d’urgence la semaine dernière. « Le Covid est une maladie qui a fait disparaitre toutes les autres« , ironise-t-il. Laurent Spelle s’est donc momentanément reconverti : il gère les hospitalisations liées au Covid et s’occupe de logistique, car son service n’a plus tellement besoin de lui. Pourquoi une telle désertion ? Il ne se l’explique pas, mais il constate que, curieusement, depuis le week-end dernier où la tension a un peu décru aux urgences, le nombre de cas d’admissions pour AVC a semblé un tout petit peu remonter.

« Il faut agir vite en cas d’AVC, dans les 6 heures. »

Cette non prise en charge dans les délais peut avoir des conséquences gravissimes. Laurent Spelle évoque un malade qui a fini par arriver à l’hôpital, mais il était déjà hémiplégique, car quand l’AVC s’est produit, il n’a pas appelé le 15. Il a trop tardé, et les séquelles sont là, impossibles à rattraper.

Agir vite pour limiter les séquelles, c’est en effet la clé pour les AVC : il faut agir dans les 6 heures, dans certains cas, on peut aller jusqu’à 24 heures, mais après c’est trop tard. Les professionnels de santé rappellent donc qu’il ne faut pas négliger ses symptômes et ne pas hésiter à appeler les secours.

Dans le point presse quotidien du ministère lundi soir, le ministre de la Santé Olivier Véran n’a pas dit autre chose : il a incité les Français à ne pas hésiter à consulter leurs médecins ou les urgences. Ils ne doivent pas renoncer à leurs soins, précise-t-il, sous peine de conséquences graves après le Covid.

Source : Covid-19 : où sont passés les AVC ?

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