Des photos avant-après de la Libye font le tour des réseaux sociaux

Par Tyler Durden
Paru sur Zerohedge sous le titre Libya Before And After Photos Go Viral


Un homme libyen qui avait pris des photos de lui à divers endroits de Benghazi en 2000 est retourné sur les mêmes lieux 18 ans après pour photographier la vie dans la nouvelle Libye « libérée par l’OTAN ».

Les photos qui montrent l’avant-après la dévastation totale de la Libye post-Kadhafi sont devenus virales, engrangeant 50 000 retweets en quelques heures après avoir été postées sur un compte qui montre des photos de la vie en Libye sous Kadhafi, entre 1969 et 2011.

Il semble que le peuple s’inquiète encore de la Libye, même si les élites politiques de Paris, Londres et Washington sont passées à autre chose. Mais, n’oublions toutefois pas que le ministre des affaires étrangères britannique, Boris Johnson, a été enregistré à son insu dans un réunion privée, l’année dernière, où il avait dit que la Libye « était mûre pour des investissements britanniques, mais seulement après que les Libyens aient « nettoyé leurs cadavres ».

Nous avions précédemment détaillé, dans Marchés aux esclaves et génocide africain : ce qu’Hillary savait, la façon dont la Libye est passée d’un État laïque moderne à un enfer de milices djihadistes, de gouvernements locaux en guerre et de marchés aux esclaves à ciel ouvert.

Ce que les photos virales confirment est que la Libye était un pays d’hôtels accueillants, de rues larges et bien entretenues, d’infrastructures fonctionnelles et de quartiers animés. Mais ces endroits sont aujourd’hui des ruines pourissantes dans le contexte politique de chaos à la ‘Mad Max’ déchaîné immédiatement après le bombardement du pays par les USA-OTAN.

Hillary Clinton dit encore aujourd’hui qu’elle n’a pas de regrets, même si Obama a timidement esquissé une espèce de mea culpa, de la sorte trop peu, trop tard, en 2016.

Bien que les… « rebelles » d’Al-Qaïda libyens chéris d’Hillary – légitimés et encouragés par un large soutien occidental – forment aujourd’hui les milices mêmes qui organisent les ventes d’esclaves et alimentent la crise des réfugiés en Europe, elle n’a jamais admis que le changement de régime en Libye ait laissé le pays et une grande partie de la région en ruines. Au lieu de quoi, elle a simplement choisi de résumer son rôle dans la tragédie de la Libye par une déclaration enjouée démentielle, « Nous sommes venus, nous avons vu, il est mort ».

Les enthousiastes des changements de régime, veuillez prendre note de ce que votre zèle aveugle a déclenché.

Un an avant les bombardements de la Libye par l’OTAN, le programme des Nations unies pour le développement avait assigné la 53ème place mondiale de l’indice de développement humain à la Libye (des 169 pays évalués, la Libye détenait le premier rang en Afrique).

Jusqu’à la veille de la campagne aérienne de l’OTAN contre l’État libyen, les médias internationaux comprenaient et reconnaissaient le rang élevé de développement humain du pays, bien qu’ensuite, il soit devenu inconfortable de rappeler les chiffres de la réussite libyenne.

La guerre de 2011 et ses suites ont créé un État en déliquescence où la population, qui était à l’époque économiquement indépendante, dépend aujourd’hui d’aides humanitaires étrangères pour sa survie.

Avant l’intervention de l’OTAN, la Libye n’était même pas sur la liste du Programme alimentaire mondial de l’ONU, mais aujourd’hui, elle est considérée comme une zone de désastre humanitaire.

Parmi les quelques éditoriaux écrits au milieu de la guerre de l’OTAN contre la Libye qui prévenaient des conséquences à venir en temps réel, il y avait un article de 2011 de Brendan O’Neill pour le Telegraph.

Même si, aujourd’hui, il a été supprimé de l’internet (il n’est plus sur le site du Telegraph non plus que dans ses archives), « Le narcissisme des impérialistes de l’iPad qui veulent envahir la Libye », de Brendan O’Neill (blogs du Telegraph) vaut une relecture.

L’article a été conservé et abondamment cité dans le livre « Slouching Towards Sirte: NATO’s War on Libya and Africa », qui comprend un résumé essentiel du rôle des médias internationaux dans les mensonges au public avant et pendant la guerre.

Nous reproduisons ci-dessous un long extrait du « Narcissisme des impérialistes de l’iPad qui veulent envahir la Libye »… toujours aussi pertinent au regard du rôle de l’Occident en Libye ou ailleurs comme en Syrie, au Yémen ou en Afghanistan.

Dans une sphère politique moderne qui a sa part de narcissiques et d’ignares, personne n’est aussi narcissique et ignare que l’interventionniste de gauche libérale. Depuis le confort de son intérieur, peut-être au son du chant des oiseaux de son jardin, l’interventionniste de gauche libérale écrit des articles furieux, écumants, sur la nécessité d’envahir des pays lointains pour renverser leurs dictateurs. Avec la même insouciance que nous autres quand nous écrivons des listes de courses, il établira un plan en 10 points pour le bombardement de la Yougoslavie ou de l’Afghanistan ou de l’Irak et n’accordera pas une pensée aux conséquences désastreuses potentielles.

Aujourd’hui, n’ayant rien appris des horreurs qu’ils ont applaudies comme des adolescentes excitables au cours des quinze dernières années, ces bohémiens du bombardement, ces lieutenants armés de leurs cappuccinos, ces impérialistes de l’iPad sont de retour. Cette fois, ils demandent l’invasion de la Libye. Dans le Guardian, Ian Birrell écarte huit ans de cauchemar irakien en une phrase – nous ne « devons pas être marqués par la stupidité de l’invasion de l’Irak », dit-il – dans un appel à une « intervention rapide » de la communauté internationale pour sauver le peuple de Libye. C’est comme un « film hollywoodien apocalyptique » et il y a même « des rumeurs de viols masculins systématiques », dit-il, prouvant encore une fois qu’aucune situation n’est si mauvaise qu’elle ne puisse être décrite de façon encore plus sombre par des plumes mercenaires, dans leur chantage aux sentiments pour obtenir quelques tonnes de bombes de la part de l’OTAN.

Sur Slate, un titre résume la vision des libéraux concernés par la Libye : « Il est temps d’intervenir ». Apparemment, les leaders mondiaux peuvent envoyer un message au monde arabe en prenant en main la crise libyenne aujourd’hui. « Avant que la région ne tombe dans un conflit civil prolongé, la communauté internationale a la possibilité, en Libye, de poser un important précédent tout en sauvant des milliers de vies. » Pendant ce temps, un troupeau d’organisations de droits de l’homme en appelle à une intervention de l’ONU et de l’UE pour « protéger les civils libyens des massacres du gouvernement ». Le fardeau de l’homme blanc se porte comme un charme, semble-t-il, bien qu’il ait été dé-Kiplinguisé * et transformé en aventure super-libérale politiquement correcte.

L’ignorance des interventionnistes libéraux est démontrée par le fait qu’ils semblent avoir oublié que les interventions désastreuses des quinze dernières années, de la Yougoslavie à l’Irak et à l’Afghanistan, ont toutes exacerbé les tensions locales et mené à plus, et non moins de sang versé. Il faut une sorte d’arrogance très particulière pour être capable d’exiger encore une autre intervention militaire alors que les conséquences terribles de la dernière sont encore étalées aux yeux de tous. Et leur narcissisme est démontré par le fait que la vraie raison de leurs exigences de guerre est de se sentir bien, de montrer qu’ils sont concernés avec un grand C. Ils ne savent rien des pays qu’ils veulent envahir, et se moquent de la déstabilisation que provoquera leur invasion suivante. Non, tout ce qui compte, c’est qu’en disant « Oubliez l’Irak, attaquons Kadhafi ! », ils peuvent étaler publiquement leur infatigable zèle moral.

Traduction Entelekheia

  • Note de la traduction : Selon Rudyard Kipling (1865 – 1936), « civiliser les sauvages » était « le fardeau de l’homme blanc ».

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