Ironie de l’Histoire dans une époque de recul de la critique sociale : Un milliardaire s’oppose au capitalisme nihiliste et guerrier le plus outrancier

L’issue des élections américaines avec la victoire de Donald Trump permet de faire une sorte d’état des lieux des forces en présence au niveau mondial,  une actualisation des forces de la domination.

N’hésitons pas à affirmer d’emblée que cette victoire est objectivement une bonne nouvelle pour les peuples, même s’il s’agit d’un événement qui ne déroge pas au mode de fonctionnement de base du système capitaliste toujours dominant. Cette bonne nouvelle ne doit pas se comprendre seulement comme l’évitement si ce n’est d’une troisième guerre mondiale, à tout le moins d’une dégradation systématique de tous les fronts existants. Il ne fait en effet aucun doute qu’une administration Clinton était clairement tentée par une aggravation de la tension avec la Russie, donc prête à entraîner le monde dans un conflit de grande ampleur.

Mais, en dehors du risque de guerre, il nous faut aussi envisager l’événement sous l’angle de l’oppression économique.

Depuis la fin des années 70, le recul de la critique sociale et de ce fait l’avantage toujours croissant des revenus du Capital sur ceux du Travail en Europe et sur le continent américain sont incontestables. Le capitalisme est triomphant et tous les pronostics issus des théories du XIXème siècle sur l’inéluctabilité de son déclin et de son achèvement apparaissent aujourd’hui dérisoires. Si l’on pouvait déjà être sceptique sur cette « nécessité historique » et l’existence d’un « sens de l’Histoire » dans le passé, cela ne mérite plus que l’on s’y attarde en 2017.

L’exigence de rompre avec le modèle capitaliste et d’y substituer une autre forme d’organisation de la société est pour nous toujours justifiée. Mais aujourd’hui, espérons momentanément, il faut prendre acte du fait que rares sont ceux à l’affirmer et même à y songer.

Néanmoins, tenter de maintenir le fil conducteur d’un projet d’émancipation nécessite de ne pas se limiter à rabâcher la dénonciation d’un système qui serait  a priori monolithique et dont, par facilité idéologique, l’on saurait déjà tout. Quelle que soit sa dénomination (capitalisme, libéralisme, ultra-libéralisme, économie de marché, libre-échange, liberté du commerce, etc…), il est plus que jamais nécessaire d’aller débusquer ses nuances, ses variantes, en pesant la nocivité relative de l’une ou l’autre forme.

Avec l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche et la haine que l’événement déclenche dans la plus grande partie de l’establishment politique américain (Démocrates comme Républicains), chez des chefs d’Etat européens comme Merkel ou Hollande, au sein de la bureaucratie européenne, des organisations internationales et des médias qui leur sont inféodés, c’est-à-dire leur immense majorité, l’opposition entre deux formes de capitalisme, nettement différenciées et en guerre l’une contre l’autre, devient manifeste.

Dans les deux formes qui s’affrontent, le socle reste toujours la dépossession et l’exploitation de la force de travail humaine pour la formation de profit par des détenteurs de capitaux. Soit, rien d’extraordinaire dans ce constat.

Mais, jusqu’à présent, la forme dominante qui a singulièrement accéléré son mode opératoire est la forme mondialiste, aboutissement ultime de la logique de marchandisation dans sa forme la plus inhumaine. Elle détruit systématiquement les nations, devenues obsolètes pour son processus de valorisation, en abolissant les frontières des Etats. Pour obtenir plus d’efficacité dans la dictature de l’Economie, libérée de toute entrave politique et morale, elle tend à éradiquer les identités, les traditions, les enracinements, les règles élémentaires de survie des sociétés. Il s’agissait pourtant de réalités et de « valeurs » que la première bourgeoisie victorieuse – de la révolution industrielle au tournant de la contestation des années 60 – avait tant promues et vantées. Elles caractérisaient l’époque désormais lointaine de l’intense concurrence entre capitalismes nationaux. Aujourd’hui, l’objectif de certains est d’imposer la gouvernance ou même une sorte de gouvernement mondial où les nations seraient devenues obsolètes. Et après l’abandon de toutes les « valeurs » de la première bourgeoisie, la seule règle sacrée maintenue peut être résumée ainsi : n’importe qui peut produire et consommer n’importe où, dans des conditions toujours plus détestables et déshumanisantes.

Le système capitaliste mondialiste bien représenté par les Obama / Clinton ou l’Union Européenne avec ses médiocres chefs d’Etat, n’a plus rien à proposer ni à promettre. L’arnaque de la construction européenne qui devait faire naître des lendemains qui chantent, apparaît dans toute sa cruauté et son ignominie. Sur le plan économique et social, ce système est idéologiquement mort. Sa promesse se réalise dans la crise permanente, la régression sociale programmée, l’esclavage par la dette, le chômage de masse, l’assistanat de survie pour surnuméraires. Pourri jusqu’à la moelle, il ne produit plus que dépossession du plus grand nombre, déshumanisation accélérée, violences, dépression, conflits inter-ethniques, terrorisme et guerre. Avec un tel bilan qui devrait éclater aux yeux de tous, s’il n’était la force du conditionnement médiatique, ce que Guy Debord appelait en son temps « le spectaculaire intégré », on pourrait s’attendre à son rejet violent de la part des peuples.

Dès lors, le seul soutien, le seul recours idéologique de ce capitalisme mondialiste criminel, est le gauchisme de mœurs, dont la falsification originelle ne pouvait qu’aboutir à une complicité totale et répugnante avec les pires forces de la domination.

Ainsi, après l’échec de Mai 68 et de tous les mouvements de contestation authentique de l’époque, la falsification et la récupération sont allés bon train. Le gauchisme qui n’est plus depuis longtemps  « la maladie infantile du communisme » mais bien plutôt « la maladie sénile du capitalisme le plus nihiliste », pure création médiatico-policière du capitalisme mondialiste, est seul à avoir survécu. Il est ainsi devenu un agent de conditionnement majeur et permet de pratiquer la terreur sur les esprits afin de rendre incritiquable la marche forcée vers un gouvernement mondial totalitaire. L’oligarchie mondialiste a bien compris l’usage qu’elle pouvait efficacement en faire. Les vieilles antiennes sur l’internationalisme prolétarien, le fameux « prolétaires de tous les pays unissez-vous », dévoyées et falsifiées en « citoyennisme mondial », sont venues à point nommé pour soutenir et dynamiser le projet capitaliste mondialiste, afin d’occulter l’éternelle question sociale.


Les ficelles sont toujours les mêmes :

  • antiracisme, droits des minorités, « multiculturalisme » imposé et donc acculturation généralisée pour mieux organiser une immigration de masse destructrice et chaotique,
  • lutte contre l’homophobie par la promotion de l’homosexualité et des sexualités marginales,
  • destruction de la famille par l’introduction de nouveaux schémas d’ingénierie totalitaire,
  • effort permanent d’entretien d’une hostilité entre les femmes et les hommes en insistant sur l’oppression supposée des premières par le mâle blanc,
  • banalisation des drogues au nom de la liberté individuelle,
  • objectivation et réification des corps,
  • artificialisation et marchandisation de la procréation,
  • idéologie des « droits de l’Homme »  avec la pratique systématique de l’ingérence humanitaire pour déclencher des guerres et déstabiliser les régimes qui ne conviennent pas à cette forme de domination mondialiste (ex Yougoslavie, Ukraine, Irak, Libye, Syrie),
  • destruction de la transmission des connaissances et des racines culturelles, de l’Histoire des peuples, et donc destruction de l’enseignement à l’école, dans le but de produire des analphabètes dociles.

Dans l’élection américaine, les Clinton, le parti démocrate et l’essentiel de l’establishment républicain, avec Hollywood, quasiment tous les médias d’envergure et les entreprises mondialistes des côtes pacifique et atlantique, œuvraient au renforcement de ce capitalisme mondialiste fanatique. Ils obtiennent l’adhésion des classes appartenant à cette nouvelle bourgeoisie côtière qui profite bien de ce mouvement mondialiste en ayant de bons revenus, de grandes satisfactions symboliques le plus souvent dans des professions parasitaires (Californie, New-York, Washington, …). Toutes ces couches de la population sont plus en phase avec les autres privilégiés du reste du monde qu’avec leurs compatriotes déclassés et paupérisés. En France, nous en avons un équivalent très efficace, bobos parisiens abêtis, crétins aux revenus plus ou moins confortables qui vivent de narcissisme grégaire en macérant dans d’indigentes individualités uniformes. Ces derniers sont la nouvelle bourgeoisie oppressive, véritable « ennemi de classe » pour les classes moyenne et populaire.

Donald Trump semble nettement représentatif de l’autre forme de capitalisme, ne dédaignant certainement pas la formation de profit et adepte de la division en classes, mais sur une base nationale, traditionnelle, identitaire, voire « paternaliste » en opposition au modèle mondialiste où les Etats-Unis deviendraient également une simple région parmi d’autres. En fonction de menaces, d’obstacles considérables, il se peut qu’il recule, il se peut qu’il échoue, mais la tentative de rupture est réelle.

Ainsi, Trump n’hésite pas à dénoncer l’immigration de masse qui importe risques terroristes et islamisation. Il semble vouloir lutter contre les délocalisations outrancières et le chômage de masse aux Etats-Unis en instaurant des taxes de type protectionniste. Il tempère l’avortement de masse comme pseudo liberté de la femme alors qu’il s’agit de la réification accélérée du corps féminin. Il souhaite résoudre les problèmes d’insécurité et de criminalité tolérées dans les centres ville, devenus un moyen de contrôle social puisque lorsque l’on vit dans la peur dans son quotidien, on a mieux à faire que de réfléchir à un changement politique. Il semble également défier la puissance de Big Pharma dans sa volonté d’imposer la vaccination de masse la plus délétère.

Alors on nous rétorquera que Trump est un milliardaire », tout-puissant patron dans l’immobilier. Certes, mais dans un pays comme les Etats-Unis, où il est impossible de réaliser une campagne présidentielle sans dépenser plusieurs millions de dollars, il apparaît comme un moindre mal qu’un candidat milliardaire utilise sa propre fortune. Cette réalité a d’ailleurs le mérite de battre en brèche la fausse représentativité des dirigeants de nos pays occidentaux qui ne sont pas des patrons pour la plupart d’entre eux mais appartiennent à l’oligarchie et travaillent frénétiquement à notre écrasement, bénéficiant de revenus et d’avantages exceptionnels. A ce titre, les Clinton sont un excellent exemple : politiciens professionnels, ils ne doivent leur enrichissement qu’au réseautage et à la corruption via la Fondation Clinton qui brasse les dons de leurs généreux donateurs étrangers.

De ce fait, en s’opposant au TPP, au NAFTA, au TAFTA, à l’immigration de masse organisée, aux délocalisations  les plus brutales, à la destruction des mœurs de la population américaine dans son immense majorité, aux guerres « humanitaires » qui ont détruit tant de pays, il devient immanquablement la cible des mêmes sempiternelles insultes : raciste, misogyne, harceleur sexuel, homophobe, agent russe, ce qui assez régulièrement aboutit à Hitler. On connaît la rengaine, c’est toujours la même, même si elle semble commencer à s’user partiellement tout au moins aux Etats-Unis. Nous ne sommes pas aussi optimistes en Europe occidentale où la liberté d’expression est nettement réduite par rapport à la situation américaine et le formatage des esprits curieusement beaucoup plus puissant chez nous. Le mensonge organisé remporte des succès considérables sur notre continent.

En conclusion, cette élection américaine est sans doute l’événement majeur de ces dernières années, un bouleversement non négligeable dont il est difficile de prévoir l’évolution. Dans une logique de survie de la question sociale, il convient d’en prendre l’exacte mesure et d’entrevoir ce que cela peut modifier pour le sort du plus grand nombre. Nous ne nous plaçons pas dans une « logique du pire » selon laquelle le capitalisme façon Trump serait une tentative de repousser l’explosion trop brutale des contradictions du système. Il faut admettre qu’il est sans doute moins abominable de conserver son identité avec éventuellement un frein aux délocalisations que de sombrer dans le maelström mondialiste nihiliste sur fond de terrorisme islamiste et de transhumanisme. Les ouvriers et employés au chômage de la Rust Belt l’ont sans doute compris. N’oublions pas que si un bouleversement social d’envergure doit surgir un jour (on peut rêver !), il se fera plus probablement avec les électeurs de Donald Trump et certainement pas avec la néo-bourgeoisie new-yorkaise ou californienne décérébrée et gauchiste, qui n’a de cesse d’afficher un mépris hautain des classes laborieuses, populaires et des classes moyennes en voie d’appauvrissement.

Nos ennemis sont nombreux. Il est important de comprendre que les activistes capitalistes mondialistes aux commandes et leurs supplétifs gauchistes sont les plus terribles et certainement les plus méprisables. Une nouvelle lutte de classe se met en place timidement mais inéluctablement entre les classes populaires et moyennes paupérisées et les couches citadines de cette néo-bourgeoisie moralement abjecte.

Patrick Visconti

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