La France continue à vendre des armes à l’Arabie saoudite qui servent contre les civils au Yémen

Auteur de l’ouvrage Quelles frontières pour les armes ? (Pédone, 2016), Benoît Muracciole a participé aux travaux d’élaboration du Traité sur le commerce des armes. Président de l’association Action, sécurité, éthique républicaines (Aser), il revient sur les débats ayant précédé l’autorisation par François Hollande de nouvelles ventes d’armes à l’Arabie saoudite.

 

Le Point : Le contrat SFMC (Saudi-French Military Contract) de ventes d’armes à l’Arabie saoudite a suscité un débat au sein du gouvernement, le Quai d’Orsay et Matignon se montrant réticents à la vente. Favorable à ce contrat, la Défense a convaincu François Hollande que ces ventes sont légales au regard du droit international, et a emporté son accord. Qu’en pensez-vous ?

Benoît Muracciole : Si on se réfère à l’article 6, al. 3 du Traité sur le commerce des armes (TCA), il n’y a pas d’ambiguïté, le Quai d’Orsay et Matignon ont raison : « Un État partie ne doit autoriser aucun transfert d’armes classiques […] s’il a connaissance, lors de l’autorisation, que ces armes ou ces biens pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des Conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil et protégés comme tels, ou d’autres crimes de guerre tels que définis par des accords internationaux auxquels il est partie. »
Or, si on consulte les rapports des Nations unies, notamment celui du groupe d’experts sur le Yémen publié en janvier 2017,ou le rapport du gouvernement britannique d’avril 2016, on y lit des accusations précises sur les attaques « indiscriminées » des deux parties (d’un côté, la coalition dirigée par l’Arabie saoudite et, de l’autre, la rébellion houtie soutenue par l’Iran, NDLR), contre des bâtiments civils, des hôpitaux, des marchés et des écoles à l’aide d’armes à sous-munitions. Les rapports des ONG vont dans le même sens : dans le cas des ventes d’armes à l’Arabie saoudite, les pays exportateurs sont tenus par l’article 6 du TCA. Ils doivent renoncer à ces ventes.

 

Pour autant et à ce stade, aucun reproche ne vise la France sur le fait que des armes françaises seraient utilisées dans cette guerre particulièrement meurtrière…

Certes. Le TCA demande que, préalablement à son accord, le vendeur « évalue, de manière objective et non discriminatoire, en tenant compte de tout élément utile, notamment de l’information fournie par l’État importateur », l’éventuelle « violation grave du droit international humanitaire ». Cela a-t-il été fait avec l’Arabie saoudite ? Je ne le sais pas.

[…]

Quant à la classe politique française engagée dans la campagne présidentielle, elle n’aborde pas le sujet des exportations d’armement…

Sauf un candidat : Jean Lassalle. Mais il est vrai que, quand on cherche les questions posées au Parlement sur la mobilisation des ventes d’armes, on perçoit vite que ce n’est pas une préoccupation de la classe politique française. Les déclarations de François Hollande sur les engagements de notre pays en faveur des droits de l’homme sont purement incantatoires, abandonnées au profit de vues économiques à court terme.

Lire l’entretien complet sur lepoint.fr

via La France continue à vendre des armes à l’Arabie saoudite qui servent contre les civils au Yémen – Egalite et Réconciliation

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