Omerta sur la viande – Pierre Hinard

Lanceur d’alerte dans l’agro-alimentaire, j’ai refusé de fermer les yeux sur la maltraitance animale et les fraudes mettant en danger la santé des consommateurs. Les industriels de la viande que j’ai dénoncés me font payer le prix d’avoir brisé l’omerta. Tous les moyens sont bons pour m’asphyxier financièrement et tenter de me faire taire.

J’ai besoin de votre soutien pour continuer le combat et rembourser les frais de justice. L’industriel a été reconnu coupable et condamné à 6 mois de prison mais reste potentiel bénéficiaire d’une subvention de 1,88 millions d’euros. C’est incompréhensible. Comment ainsi faire jurisprudence et décourager les patrons sans scrupules?

Je m’appelle Pierre Hinard, voici mon histoire.

Agronome, je suis entré il y a une dizaine d’années dans une importante société d’abattage et de découpe de viande en Loire-Atlantique (Castel Viandes SA) qui fournit de grands noms de l’agroalimentaire et de la grande distribution, comme McDonald’s, Flunch, Auchan ou encore William Saurin.

Moi qui croyais en la qualité et l’excellence j’ai découvert la réalité du steak haché industriel, les dessous pas très propres des « usines à viande » : Souffrance animale évitable, compromissions, malversations, analyses faussées, dates truquées…

Ne supportant pas ces délits, j’ai alerté les services de contrôle. Résultat : mon entreprise m’a licencié pour faute, sur le champ.

S’en est suivie une campagne pour me discréditer, m’empêcher de retrouver un emploi dans l’agroalimentaire. Mes anciens collègues ont été encouragés à manifester contre moi, au prétexte que mes révélations mettaient en péril l’avenir de l’entreprise. Sur les banderoles, on pouvait lire : « la rumeur tue, sauvons nos emplois », « contre l’ex-cadre calomniateur ». Castel Viandes cherchait ainsi à faire pression sur moi et ma famille.

Quelques semaines plus tard, l’entreprise et ses dirigeants étaient mis en examen par la justice pour commercialisation de denrées alimentaires préjudiciables à la santé du consommateur !

Blacklisté partout dans l’agroalimentaire, je suis devenu mon propre employeur en m’installant comme agriculteur bio. Aussi incroyable que cela puisse paraître, je me suis vu refuser en toute illégalité les aides d’Etat à l’installation et on continue de me priver des aides compensatrices des prix agricoles artificiellement bas, versées chaque année par l’Europe. Le président de la Chambre d’Agriculture de Loire-Atlantique a pris la peine d’écrire au Ministère de l’Agriculture pour raconter par le menu toutes les pressions exercées contre moi et la perte financière qui en découle. Mais rien n’y fait. La situation reste bloquée, on veut me réduire au silence.

J’ai fait l’objet d’un véritable harcèlement judiciaire orchestré par mon ancienne entreprise. Quand j’ai sorti mon livre « Omerta sur la viande, un témoin parle », ils m’ont aussitôt attaqué en diffamation. Cela m’a valu 4 années d’instruction. J’ai dû prendre un avocat. Tout cela pour que l’entreprise retire sa plainte la veille du jour fixé pour le procès, en Janvier 2019. Le procès n’ayant pas eu lieu, je n’ai pas pu obtenir le remboursement de mes frais de défense.

Parallèlement, j’avais saisi les Prud’hommes pour faire annuler mon licenciement en application de la jurisprudence de la Cour de cassation de juin 2017 sur l’impossibilité de mettre à la porte de l’entreprise, un salarié qui a lancé l’alerte. En première instance, après 10 ans d’attente, les Prud’hommes de Nantes m’ont débouté sans même faire référence à mon statut de lanceur d’alerte ni au fait que l’industriel Castel Viandes avait été mis en examen suite à mes révélations. Un déni de justice.

Soutenu par l’association Anticor, j’ai fait appel du jugement de première instance des Prud’hommes de Nantes près de la Cour d’appel de Rennes. Suite à la condamnation de l’industriel, la deuxième audience aura lieu le 15 Février 2024 en présence de mon avocate Eva Joly.

J’ai besoin de vous car chaque recours est onéreux. Après 14 ans de procédures qui m’ont coûté des dizaines de milliers d’euros (dernières dépenses: constitution de partie civile: 6500€, Appel aux Prud’hommes: 18500€…), je ne peux continuer seul cette bataille, afin que l’entreprise soit condamnée en Justice.

Le procès au Pénal de l’entreprise a eu lieu le 05 Mai 2022. Première victoire, le Procureur de la République a salué « le travail du lanceur d’alerte » et a pointé un « comportement irresponsable de l’industriel qui n’a d’autres motivations que sa recherche du profit ». Cependant, le procès était terriblement déséquilibré. Malgré un dossier édifiant, l’industriel et ses 4 avocats se sont retrouvés sans aucun contradicteur: l’administration compétente (protection de la population, gendarmes spécialisés) qui étaient cités à comparaître ne se sont pas présentés. La seule personne compétente pour répondre dans la salle c’était moi, or la présidente du tribunal m’a interdit de parler plus de 3 minutes, et m’a interdit de répondre aux mensonges des avocats et du pseudo-expert de l’industriel. Ceux qui ont vu le film Goliath peuvent y voir un description réaliste de ce que j’ai subi ces deux derniers jours et depuis le début de mon combat. Le 30 Juin 2022, la société a été condamnée à 40 000 € d’amende, son patron à 10 000 € et six mois de prison avec sursis. C’est une victoire, mais c’est bien peu face à la gravité des faits et une bien faible jurisprudence. Ce n’est pas terminé: le jugement pour le procès en appel de mon licenciement n’a pas été rendu.

Aujourd’hui, j’ai besoin de soutien pour gagner la bataille judiciaire engagée, rembourser les frais de justice et montrer que les lanceurs d’alerte peuvent compter sur l’opinion publique.   

Après avoir mené seul le combat durant des années, je fais appel à vous.

 

Pierre Hinard

 

En vidéo, mon interview par Thierry Ardisson lors de la sortie de mon livre témoignage.

 

Source : Mon combat de lanceur d’alerte pour la santé des consommateurs – Okpal

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