La jeunesse n’est plus dans la rue … – ParisVox
S’il y a bien une chose qui a changé en quarante ans, c’est la rue. Quand j’étais gosse, la rue était l’espace de jeu privilégié du gamin des villes. Je crois d’ailleurs avoir passé la majorité de mon temps extrascolaire dans la rue. Vélo, billes, saute-mouton, foot, cow-boys et indiens, policiers et voleurs, skateboard, roller … Chaque fin de journée comme depuis des siècles la rue se peuplait d’enfants qui l’espace de quelques heures s’inventaient des mondes, vivaient des aventures extraordinaires avec trois bouts de carton, devenaient les héros d’un quartier pour un pénalty arrêté. La rue faisait les bandes, les copains, délimitait des territoires, générait des frontières, annonçait les bagarres, les triomphes et les défaites. On explorait le réel sur un pâté de maisons. Hiérarchies, rivalités, amours, jalousies, passions et haines prenaient corps en nous par cette école du trottoir. Nos parents, incroyablement permissifs, ou tout simplement humains, nous offraient cet inestimable cadeau à apprivoiser, la liberté. Cela n’allait pas sans heurts, sans risques, sans pleurs. La rue pouvait être une rude école. Mais elle était toujours la promesse d’une découverte de soi et des autres, l’artère qui irriguait notre imagination. Dehors, on pouvait devenir ce que l’on voulait : magicien, super-héros, justicier de l’espace, chef sioux ou grand braqueur de banque. A coup de « Pan t’es mort », on ritualisait une sociabilité forte et on répétait les leçons que nous apprenait quelques centaines de mètres de goudron.
La rue faisait les bandes, les copains, délimitait des territoires, générait des frontières, annonçait les bagarres, les triomphes et les défaites.
Aujourd’hui les rues sont vides. Vides d’enfants. La rue s’est rationnalisée. Elle est désormais un enjeu commercial entre fast-foods, boutiques de téléphonies et agence bancaires. Il faut slalomer entre les scooters, les panneaux publicitaires, la profusion de voitures plus ou moins bien garées. Le trottoir s’est comme rétréci pour laisser place au profit, un impératif d’adultes.