«L’idéologie des droits de l’homme porte en elle une logique illimitée»
GRAND ENTRETIEN – Pour Le Figaro, les penseurs Pierre Manent et Jean-Claude Michéa ont accepté de débattre par écrits interposés.
LE FIGARO. – Jean-Claude Michéa, votre dernier essai s’intitule Le Loup dans la bergerie. Ce «loup» dont vous parlez, est-ce l’anthropologie libérale des droits de l’homme? En quoi est-elle problématique?
Jean-Claude MICHÉA. – Ce qui fait problème, ce n’est pas l’existence de telle ou telle liberté individuelle ni de chartes garantissant des droits fondamentaux. C’est l’idée que seule l’idéologie des «droits de l’homme» – telle qu’elle s’est forgée au XVIIIe siècle – serait à même de fonder intellectuellement la défense de ces libertés et de ces droits. Or cela revient à oublier, d’un côté, qu’il existait déjà en Europe – pour reprendre le titre du célèbre ouvrage de Quentin Skinner – une longue tradition politique de «liberté avant le libéralisme» (le droit, par exemple, de ne pas être arrêté et emprisonné arbitrairement est au cœur de la Magna Carta de 1215).
Et, de l’autre, que cette idéologie repose sur la fiction anthropologiquement absurde (une «robinsonnade», ironisait Marx) d’un homme déjà …
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