Pièces et main-d’œuvre, « Origines du Sars-Cov-2 : la vérité s’est-elle échappée du laboratoire ?

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Pièces et main-d’œuvre 
Origines du Sars-Cov-2 : la vérité s’est-elle échappée du laboratoire ?

Mis en ligne par Pièces et main-d’œuvre sur leur site  le 15 mai 2021

La revue scientifique Science publie ce 13 mai 2021 une lettre d’une vingtaine de chercheurs américains, réclamant une enquête sur les origines du Sars-Cov-2. « Nous devons considérer sérieusement les deux hypothèses, celle de l’origine animale et celle de la fuite d’un laboratoire jusqu’à ce que nous ayons suffisamment de données[1] », écrivent-ils. De son côté, le rédacteur en chef explique : « Le but de notre rubrique Science’s Insights est d’offrir aux scientifiques le meilleur espace de discussion sur la science. Aussi, vu l’importance du sujet, l’ampleur de l’expertise et les qualifications éminentes des auteurs, la décision de publier leur lettre était facile. »

Quel intéressant moment. Il n’est pas donné tous les jours d’assister à d’aussi impudents retournements de vestes, à en attraper des torticolis. Le Monde et ses suiveurs de la presse française sautent sur l’occasion pour faire oublier ce qui fut plus qu’une faute professionnelle, un aveuglement idéologique digne des pires mouvements sectaires. Que de leçons ces prêcheurs ne nous ont-ils pas assénées durant cette année d’épidémie, martelant nos fronts de leur index comminatoire pour y faire entrer la vérité certifiée : « non, le virus ne s’est pas échappé d’un laboratoire ».

France Culture, dans un podcast tout en nuances mêlant origines du Sars-Cov-2, Protocole des sages de Sion et négationnisme :

« Que n’avons-nous pas lu ou entendu sur l’origine du coronavirus ? Depuis son apparition en décembre 2019, les déclarations les plus abracadabrantes sur l’origine du Covid 19 ont fait florès sur les réseaux et dans la presse. Car son caractère naturel ne semble pas satisfaire tout le monde[2]. »

The Conversation : « Rien ne prouve que le coronavirus a été créé en laboratoire : les dessous de l’infodémie sur le Covid-19[3]. »

Le Monde et ses brillants Décodeurs : « L’étrange obsession d’un quart des Français pour la thèse du virus créé en laboratoire. Alors que son génome est connu et prouve le contraire, une part importante de la population pense que le coronavirus a été créé par l’homme[4]. »

Avant que le ministère de la Vérité et le commissariat aux Archives n’effacent toute trace de ces délires journalistiques, rappelons les faits.

Fin mars 2020, en plein confinement, la fondation Jean-Jaurès et Conspiracy Watch, « observatoire du conspirationnisme » – en fait une officine de falsification idéologique – réalisent un sondage avec l’Ifop, que la presse relaie les jours suivants : 26 % des Français pensent que le virus a été fabriqué en laboratoire, intentionnellement ou accidentellement. Les Américains partagent d’ailleurs cette opinion à 29 %. Conclusion des auteurs, Jérôme Fourquet (Ifop) et Rudy Reichstadt (Conspiracy Watch) :

« En d’autres termes, les Français ne seraient pas beaucoup moins « complotistes » que les Américains sur l’origine du nouveau coronavirus. […] L’opinion publique française […] n’a, pour autant, manifestement pas été totalement immunisée contre la diffusion d’une lecture de type conspirationniste de cette épidémie même si la proportion de personnes adhérant à l’idée d’une origine naturelle du virus est nettement plus élevée qu’outre-Atlantique[5]. »

Le 28 mars 2020, ces phares de la virologie affirment, avec une assurance que peut seul fournir un diplôme de Sciences-Po, que le Sars-Cov-2 est d’origine naturelle et que toute opinion divergente relève du conspirationnisme dont ils sont les spécialistes. La preuve, Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, jouit depuis d’une couverture médiatique remarquable. Jusqu’au Sénat, dont la délégation à la prospective auditionne notre expert en coronavirus le 23 avril 2020. Il y pérore sur les ressorts du complotisme, les mesures à prendre, et déclare sans ciller :

« Cet imaginaire complotiste autour du coronavirus s’est cristallisé autour de l’idée que ce virus n’était pas d’origine naturelle, qu’il était artificiel, qu’il avait été fabriqué en laboratoire. Or, jusqu’à preuve du contraire, on sait que ce virus est le produit d’une mutation naturelle. Son génome a été séquencé par de nombreux laboratoires dans le monde et son séquençage ne montre pas de trace de manipulation humaine. Cela permet de dire aux scientifiques qu’il est le produit d’une évolution naturelle. »

Jusqu’à preuve du contraire, Rudy Reichstadt décerne donc ses brevets de saine pensée, perché sur son « observatoire ». D’autant qu’un paramètre du sondage Ifop empêche ses lecteurs, journalistes, commentateurs, parlementaires, de réfléchir correctement. Les sympathisants du Rassemblement national sont surreprésentés parmi les Français qui croient à une fuite de laboratoire. Patatras. Si le RN dit que la Terre est ronde, c’est une théorie complotiste et nous sommes sommés de rejoindre les platistes.

Voilà pourquoi, amis lecteurs qui suivez notre feuilleton sur les origines du virus depuis un an, vous n’en avez trouvé nul écho dans la presse dite de référence. Tout juste ses journalistes commencent-ils à piller sans les citer nos enquêtes et celles des anonymes – ou non – du monde entier, qui ont partagé leurs recherches. Seul le sociologue Laurent Mucchielli a le fair play de rapporter comment nous avons, parmi les premiers en France, documenté l’hypothèse d’une fuite de laboratoire[6].

C’est comique, mais il faut bien le constater : les journalistes, comme les scientifiques, ont détourné les regards d’une hypothèse qu’ils auraient dû creuser (ou alors, qu’ils changent de métier), par peur d’être assimilés à l’extrême-droite, à Le Pen et à Trump. Surtout, on ne remet pas en cause le discours élogieux que la Science tient sur elle-même. Voilà toute leur autonomie intellectuelle. Ils nous ont laissés ouvrir la brèche, risquer l’anathème (au point où nous en sommes) quitte à le brandir eux-mêmes, attendant courageusement qu’on parle d’autre chose, et tout en noyant notre travail sous le dégueulis d’insanités des réseaux sociaux. Les voilà pour finir réduits à tortiller du titre à propos d’une piste « qui resurgit » (mais qui l’avait enfouie ?), ou d’une hypothèse « finalement crédible ». Le Monde nous communique ce 15 mai 2021 la nouvelle ligne officielle : « L’hypothèse d’un accident de laboratoire comme origine possible de la pandémie de Covid-19 n’est ni majoritaire ni la plus probable, mais elle n’est pas une théorie complotiste[7]. » Que vont dire Rudy Reichstadt et Conspiracy Watch ?

***

Revenons à cette lettre de scientifiques soudain pris d’une crise de conscience. Parmi les signataires, distinguons Alina Chan, biologiste au Broad Institute (MIT), qui n’a cessé de creuser l’hypothèse de la fuite de labo, insistant sur la troublante adaptation du Sars-Cov-2 aux récepteurs humains dès son émergence. Elle a également expliqué qu’étant post-doctorante, elle avait « moins à perdre » dans cette recherche que des scientifiques établis craignant pour leur carrière[8].

De qui pouvait-elle parler ? Peut-être d’un autre signataire, Ralph Baric. Lui est virologue à l’école de médecine de l’université de Caroline du Nord, à Chapel Hill, et d’après ses collègues, l’un des meilleurs spécialistes au monde des coronavirus. Il est bien placé pour s’inquiéter d’une fuite de laboratoire, il trafique les virus depuis des décennies. Dès 1995 il a réussi à faire sauter la barrière d’espèces à un coronavirus – de souris à hamsters. Au début des années 2000, il recrée en laboratoire le génome d’un coronavirus de la souris, selon un procédé « sans couture » indétectable, qu’il baptise « No see’m technology ». Pas vu, pas pris. En 2008, son équipe publie un article décrivant comment elle a manipulé un virus de chauve-souris pour le rendre contagieux pour l’homme, en lui ajoutant une section de la protéine spike du SRAS-CoV (le premier). Un brevet déposé en 2015 concerne ses bidouillages sur la protéine « spike » des coronavirus, à des fins de recherche de traitements ou de prévention de la maladie[9].

2015, c’est l’année où Ralph Baric débute sa collaboration avec Shi Zhengli, la spécialiste des coronavirus du laboratoire P4 de Wuhan. Ces docteurs Folamour sino-américains ont modifié par la méthode des gains de fonction[10] un virus de chauve-souris, le SHC014, pour le rendre plus contagieux[11]. Le magazine américain Vice nomme cet alien le « SRAS 2.0 ». Nul doute que Shi Zhengli a profité de cette coopération pour perfectionner ses techniques de génie génétique.

Que vient faire Ralph Baric dans cette démarche remarquée en faveur d’une enquête sur les origines du Sars-Cov-2 ? Son collègue Peter Daszak, autre chercheur américain ayant collaboré avec le P4 de Wuhan, lui avait pourtant déconseillé de signer une tribune parue le 18 février 2020 dans The Lancet, pour éviter d’être repéré comme manipulateur de coronavirus. Cette tribune contre les « théories conspirationnistes » affirmait que l’origine naturelle du virus ne faisait aucun doute[12].

Baric est dans la mire des enquêteurs sauvages du monde entier en raison de ses bidouillages de virus et de sa collaboration avec le labo de Wuhan. Peut-être tente-t-il de diluer sa mauvaise conscience et sa responsabilité dans cet appel à la transparence. Peut-être sa signature est-elle le signe que le vent tourne, que ceux qui ont enquêté sans relâche depuis un an ont finalement percé la cuirasse de mensonge et de lâcheté de la corporation scientifique. A suivre…

Pièces et main d’œuvre
Grenopolis, le 15 mai 2021

Lire aussi sur www.piecesetmaindoeuvre.com :

  • Le virus à venir et le retour à l’anormal (28/04/20)
  • Un virus d’origine scientifreak ? (8/06/20)
  • Origine du Sars-Cov-2 : le CNRS partage les doutes de notre comité scientifique (27/10/20)
  • Origine du Sars-Cov-2 : France Info contaminée par le doute (8/11/20)
  • Origine du Sars-Cov-2 : Le Monde complotiste ? (22/12/20)
  • L ’OMS n’ a rien vu à Wuhan ( 19/02/21 )
  • Origine du Sars-Cov-2 : des fissures dans la muraille de Chine (31/03/21)

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Notes

[1]  « Investigate the origins of Sars-Cov-2», Jesse D. Bloom et alii. Science, 13/05/21, https://science.sciencemag.Org/content/372/6543/694.l/tab-pdf

[2]   « Mécaniques du complotisme », 28/04/20, https://www.franceculture.fr/emissions/mecaniques-du-complotisme-sa

[3] Éric Muraille, The Conversation, 5/04/20

[4] Le Monde, 31/03/20

[5]      « L’épidémie dans l’épidémie : thèses complotistes et Covid-19 », Rudy Reichstadt, Jérôme Fourquet, 28/05/21

[6] https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/100521/l-epidemie-

(7)Le Monde, 15/05/21

[8]    https://www.technologyreview.corn/2021/03/18/1021030/coronavirus-leak-wuhan- lab-scientists- conspiracy/

[9]    « Methods and compositions for chimeric coronavirus spike proteins», 20/03/15, https://patents.justia.com/patent/20170096455

[10]  Cf. « Le virus à venir et le retour à l’anormal » (26/04/21) et « Un virus d’origine scientifreak ? » (8/06/20) sur www.piecesetmaindoeuvre.com et Pièces détachées n°92/92’

[11]  « A SARS-like cluster of circulating bat coronaviruses shows potential for human emergence », Nature medicine, déc. 2015.

[12]       https://www.thelancet.com/joumals/lancet/article/PIISO 140-6736(20)30418-9/fulltext

Source : Pièces et main-d’œuvre, « Origines du Sars-Cov-2 : la vérité s’est-elle échappée du laboratoire ?  | «Les Amis de Bartleby

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