Soutien à la rébellion du Donbass : « Quand le vin est tiré, il faut le boire ! »
Lorsque je vois ici l’irresponsabilité des uns soutenant l’Ukraine dans une servitude volontaire aveugle et suicidaire, ou là l’imbécilité des autres continuant à clamer que les opérations militaires russes en Ukraine se déroulent comme prévu, et surtout l’insouciance de la majorité des populations devant la menace de plus en plus nette et précise et proche d’un nouveau conflit mondial, j’avoue avoir du mal à lutter contre cette misanthropie qui désespère de l’intelligence humaine.
Pierre, un frère d’armes de longue date et, comme moi observateur attentif (et inquiet) des tectoniques géopolitiques secouant les civilisations, me rappelait cette sentence du général Beauffre plus que jamais d’actualité :
« la guerre, c’est l’affrontement des volontés »
Et ces « volontés » aujourd’hui de s’imposer non seulement des Etats Majors militaires aux tranchées des fantassins russes et ukrainiens, mais aussi dans les officines politiques nationales et internationales et jusqu’aux salles de rédactions de leurs chiens de garde médiatiques où, à défaut de chairs à écraser sous les obus, c’est la paix, et comme toujours la vérité qui sont saignées sur les autels de la sécurité ou de l’hégémonie selon de quel côté on regarde le conflit.
Et c’est peut-être dans ce dernier niveau géopolitique du conflit pour lequel des bataillons entiers de pères de frères et de fils fondent sous la mitraille que se trouvent des éléments de réponse pour les quidams qui ne comprennent pas tout dans cette nouvelle tragédie européenne où sont aveuglés par l’affrontement des mensonges.
Car cette guerre, qu’il serait temps pour les populations européennes de considérer comme autre chose qu’un « war game » parasitant l’esprit critique dans une saturation d’images et de bruits enchaînant quotidiennement l’Homme post-moderne à la pensée dominante. Car cet affrontement militaire des volontés dont l’écho des batailles circulent instantanément à travers le Monde n’est que la déclinaison paroxysmique d’affrontements politiques, économiques et ontologiques de puissances s’opposant leurs paradigmes en devenir et dont les champs de bataille s’étendent à l’infini des territoires humains de la géographie mais aussi des rêves et du sacré.
Depuis Donetsk, cet avant poste du chaos mondial arrivant, j’observe:
- D’un côté, une Russie menant un combat survivaliste, acculée sur ses frontières depuis la chute de l’URSS au cours de laquelle les USA auraient aimé voir « le bébé disparaître avec l’eau du bain », mais qui n’a pas su se débarrasser de cet atavisme politique et culturel rigidifiant ses commandements et ses réactivités.
- De l’autre côté, une ploutocratie capitaliste enfin sortie de sa chrysalide des nationalismes industriels vouloir imposer par le chaos de conflits divers et exponentiels la dictature d’un marché mondial, stade ultime de son hégémonie militaro industrielle recherchant l’aliénation totale des peuples à la pensée unique de sa marchandise.
- Au milieu de cet affrontement eschatologique, des peuples européens domestiqués par les Etats-Nations et subissant aujourd’hui la vassalisation de ces derniers à un Nouvel Ordre Mondial amoral organisant dans leurs sociétés décadence civilisationnelle et clivages sociétaux parachevant la paralysie politique des consciences individualisées
Et lorsque la Guerre militaire survient, alors les mots prononcés par les Tartuffe et les Torquemada propagandistes deviennent derrière leurs rodomontades mensongères auto suggestives, stériles et ridicules des maux bien réels et contre productifs qui assassinent sans vergogne la Vérité, la Liberté et la Paix fanatisant les consciences ou pire en les trompant pour qu’elles sacrifient sur l’autel des fantasmes, leurs servitudes mais aussi leurs âmes et leurs corps. Or un combattant n’a jamais autant été invincible que face à la réalité crue même la plus difficile et fortifié par une confiance en ses chefs forgée au feu de la Vérité.
Aujourd’hui les portes du chaos se sont à nouveau grandes ouvertes et la convergence métapolitique des différentes guerres éclatent au grand jour.
Si, sur le plan de la guerre économique Moscou résiste très bien à ses adversaires mondialistes malgré des sanctions occidentales hystériques dont il est cependant stupide de prétendre qu’elles ne sont pas impactantes, en revanche sur le plan du conflit militaire, l’option initiale choisie par le Kremlin rencontre factuellement des « difficultés » dont les raisons (qui ne sont pas toutes des erreurs) sont diverses, internes et externes. Quant au plan de la guerre de l’information, à mon grand désespoir, force est de constater, qu’en dehors d’un argumentaire politique légitime relevant d’un « bon sens commun » universel, que Moscou est plutôt « à la ramasse », enlisant la communication russe dans une propagande obsolète jusqu’au ridicule.
Or, si dans une guerre économique on peut vaincre (peut-être) son ennemi, cette victoire ne sert à rien si elle n’est pas accompagnée (et même subordonnée) par la victoire d’une guerre militaire engagée contre ce même ennemi et pour laquelle les batailles menées sur le front de l’information jouent un rôle de plus en plus considérable dans l’hyper communication de notre société du spectacle, anesthésiant ou excitant les volontés au gré des enjeux défendus et des menaces subies.
Lorsqu’on appartient au camp antimondialiste, donc pro-russe, se voiler la face par fanatisme tout comme être défaitiste par faiblesse ne sert à rien, car dans les deux cas, le déni ou la soumission de l’individu devant le pessimisme de la raison l’éloigne de la ligne de crête étroite du réalisme qui seul, peut faire germer l’optimisme de la volonté et conduire l’espérance sur sur le chemin de la Victoire. Sur tous les champs de bataille et surtout ceux de la guerre, lorsque les orages d’acier grondent devant les bataillons, la stupidité des larbins et la trahison des lâches sont « in fine » un danger pour leur propre camp bien plus que pour celui de l’adversaire.
La percée ukrainienne de Balaklaïa est l’illustration de cette réalité de l’Histoire parasitée par le fantasme des fanatiques ou le fatalisme des défaitistes, et si elle est une rupture définitive c’est celle de la stratégie initiale russe sanctionnée magistralement ici par un « trop peu, trop tard », car désormais, même si elle ne s’est pas déclarée juridiquement comme tel, c’est bien l’OTAN qui est désormais, aussi et surtout, l’adversaire militaire factuel de la Russie.
Balaklaïa, selon moi a scellé définitivement l’échec du format initial des opérations spéciales russes en Ukraine qui, de mois en mois, de retrait en retrait (Kiev, Tchernigov, Soumy, Kharkov) et malgré des victoires évidentes (Kherson, Melitopol, Volnovakha, Marioupol, Popasnaya, Severodonetsk) a montré que sa limitation d’engagement (entre 150 000 et 200 000 hommes seulement et une préservation des structures socio-économiques et étatiques ukrainiennes) était finalement inefficace car le régime de Kiev n’est pas tombé, sa militarisation atlantiste est augmentée, que son Etat-Major a même repris l’initiative jusqu’à pouvoir reprendre certains territoires.
Aujourd’hui, la nécessité d’un « changement de format » radical s’impose à Moscou dans ce conflit que la Russie ne peut en aucun cas perdre car il lui est existentiel. La question est de savoir quand et surtout comment les forces russes vont pouvoir enclencher la vitesse supérieure sans accepter ce grand saut dans une troisième guerre mondiale vers laquelle, en Ukraine, la stratégie hégémonique étasunienne les pousse depuis 2014.
Fondant ma réflexion essentiellement à travers le prisme du terrain militaire réel, mon regard se tourne actuellement vers Krasni Liman où j’ai 2 camarades qui se battent. Cette localité (appelée aussi Lyman) de plus de 20 000 habitants avant la guerre est située au Nord de Slaviansk de l’autre côté de la rivière Siversky Donets (appelée aussi Donets). Krasni Liman, qui a été libérée le 27 mai dernier est aujourd’hui un bastion allié important à plus d’un titre:
- Militairement il est le verrou en arrière de la croisée des rivières Donets (Est-Ouest) et Oskol (Sud-Nord) sur lesquelles s’appuie la ligne de front,
- Politiquement, sa capture par Kiev serait symbolique car cette ville est sur le territoire ce la République Populaire de Donetsk contestée depuis 8 ans,
- Médiatiquement, il est présenté par Kiev comme la première étape de la reconquête des villes de Lisichansk et Severodonetsk qui sont plus à l’Est.
Lorsque l’offensive ukrainienne, profitant de la faiblesse crasse du front russe entre les secteurs de Slaviansk et Kharkov, bouscule les défenses de Balaklaïa et poursuit en moins de 3 jours son élan jusqu’aux villes stratégiques de Koupiansk au Nord et Izioum au Sud, les forces alliées sont obligées de se replier sur la rivière Oskol à l’Est et les frontières russes au Nord. Loin d’être un « écrasement ukrainien magistral » des forces russes, pas plus qu’un « retrait russe audacieux et rusé » pour un redéploiement vers Donetsk, ce succès militaire incontestable de Kiev sur le front de Kharkov a sonné le glas de cette stratégie initiale russe en Ukraine du « trop peu trop tard » obligeant le Kremlin à « revoir sa copie » pour un style plus agressif et radical.
Mais les conséquences désastreuses de cet échec ne sont pas encore terminées.
La question désormais est de savoir où et quand le nécessaire nouveau format militaire russe va apparaître et surtout quel sera son déclencheur qui selon doit intervenir avant que les forces ukrainiennes ne conservent l’initiative opérative dans une nouvelle offensive sur un nouveau front (comme celui de Zaporodje par exemple).
Aujourd’hui à Krasni Liman se déroulent les combats les plus acharnés du moment, expression des enjeux du secteur, de cet affrontement des volontés évoqué plus haut mais aussi de cette métamorphose des stratégies militaires en œuvre de chaque côté du front :
- Du côté ukro-atlantiste, l’ingérence de l’OTAN dans le conflit a fait clairement évoluer sa stratégie d’équipement à une stratégie d’engagement humain stratégique et tactique, via une implication offensive des ressources de guerre électronique (guidage satellitaire et aéroporté des missiles) offrant à Kiev l’illusion offensive.
- Du coté russo-républicains, l’essoufflement des opérations militaires dû à cette implication exponentielle de l’OTAN mais aussi à un engagement minimaliste russe, une sous estimation de l’adversaire militaire et politique et aussi d’inévitables erreurs tactiques impose la redéfinition d’une stratégie pour reprendre l’initiative.
Sur le front Nord Donbass, cette seconde bataille de Krasni Liman (après celle du 24 au 27 mai), et quelle que soit son issue, pourrait-être ce point de départ à partir duquel s’opère la une radicalisation du conflit avec un engagement russe élargi dans des moyens et objectifs adéquats pour répondre à la métamorphose atlantiste de son ennemi.
Aujourd’hui les combats de rue continuent dans la ville déchirée de Krasni Liman par une ligne de front confuse, et les forces alliées renforcées par 2 brigades russes venues du Nord résistent à leur encerclement (les villages de Yarova, Krimki, Aleksandrovka à l’Ouest de la ville sont tombés côté ukrainien) en infligeant de lourde pertes à des forces ukrainiennes s’essoufflant également. Actuellement les forces ukrainiennes, qui ont échoué à percer les défenses Sud de Krasni Liman (secteur gare ferroviaire) malgré l’utilisation massive de munitions incendiaires, tentent de contourner la ville par l’Est tandis que d’autres unités mènent une offensive venant des forêts à l’Ouest en direction d’Oskol.
Encore enlisé dans cet attentisme stratégique et cette naïveté de croire que le dialogue diplomatique encore possible, Moscou a choisi d’entrer progressivement dans cette nouvelle phase du conflit et inévitablement plus violente, avertissant pour la énième fois ses ex « partenaires occidentaux de ne plus aller en avant dans leur « co-belligérance » ou en faisant des démonstrations de puissance militaire avec par exemple les récentes frappes de missiles de croisière sur les centrales électriques ukrainiennes orientales ou sur le barrage de Krivoï Rog.
En attendant, à Krasni Liman et ailleurs des soldats meurent pour la Grande Russie, tandis qu’à Donetsk et Belgorod des civils russes sont déchiquetés par les missiles de l’OTAN.
Mon allégeance et mon engagement pour la cause des peuples, incarnée par cette résistance héroïque de la Russie à l’hégémonie mondialiste n’a pas faibli d’un iota mais j’attends avec impatience que Moscou arrête de subir les insultes de la propagande occidentale, les attaques qui ne sont même plus voilées de l’OTAN, et cesse ses demi mesures militaires sacrificielles qui aujourd’hui non seulement sont obsolètes et qui, à terme pourraient menacer la réussite des opérations militaires en Ukraine et la cohésion patriotique autour du pouvoir en Russie.
7 mois c’est déjà trop long, et maintenant que toutes les diplomaties et patiences russes ont échoué, il est temps de relever le gant de l’OTAN que son proxy bandériste a jeté au visage de la Russie et de ses alliés, et dans une réaction radicale qui est maintenant inévitable. Car plus tard cela sera décidé, plus dur sera le prix à payer pour la liberté des peuples.
A Krasni Liman, l’ « estuaire » est aujourd’hui « rouge » du sang des soldats alliés se battant avec acharnement contre un ennemi supérieur en nombre et ayant quasi encerclé leurs positions. Les renforts supplémentaires arriveront -ils à temps ? L’avenir très proche nous le dira. Ce qui est probable, c’est que cette bataille, et quelle qu’en soit l’issue, va être un marqueur fort dans le basculement du conflit vers une guerre sans merci et malheureusement sans limite de moyens (ce qui est déjà la stratégie de Biden).
Certains jugeront peut-être ces lignes « négativistes », voire « défaitistes », mais peu me chaut de leurs fantasmes fébriles avec lesquels ils droguent leurs courtisanismes des salons feutrés de certitudes immatures Ce que je sais pour écouter le chant des oiseaux, le sifflement des obus, les pleurs des enfants, le chuchotements des hommes, le sourire des femmes et la caresse du vent c’est que dans leur immense majorité les peuples de Russie sont résolument derrière leurs soldats, n’en déplaise aux autres propagandistes qui en face rêvent d’un changement de pouvoir à Moscou (si changement il y avait, le nouveau pouvoir leur plairait assurément encore moins).
A l’exemple de la république de Tchétchénie qui alimente le front russe avec des milliers de volontaires, une vague d’ « auto-mobilisations » est en train de naître en Russie depuis Vladivostok jusqu’à Mourmansk, alternative intelligente et populaire à une mobilisation officielle qui fragiliserait l’économie et le contrat social de la nation. Demain des dizaines de milliers de volontaires viendront porter au bout de leurs fusils d’assaut cette volonté de défendre coûte que coûte cette « union des peuples » restée vive dans les coeurs des communautés de la Fédération de Russie.
Voici pour conclure une analyse sans ambages de Paul Craig Roberts, fonctionnaire puis journaliste américain et connu pour être l’un des plus virulents antimondialistes dénonçant l’impérialisme des néoconservateurs étasuniens qu’il connaît de l’intérieur. Fidèle à sa libre pensée et son sens critique indépendant Paul Craig Roberts porte ici un regard sévère sur la stratégie russe et que rejoint ma pensée lorsque depuis des mois j’évoque le « trop peu trop tard » de cette stratégie initiale russe en Ukraine.
« Nous avons besoin d’une victoire »
Erwan Castel
Dernière minute !
Alors que sur de nombreux médias russes le discours nationaliste se radicalisent, de nouvelles forces russes se déploient dans les districts militaires frontaliers à l’Ukraine avec notamment des centaines d’hélicoptères, d’avions de combat et de nombreux bombardiers stratégiques.
A suivre…
Source de l’article : Les 7 du Québec
Par Paul Craig ROBERTS
Je déteste entendre « Je vous l’avais bien dit » et voilà que j’utilise ces mots.
Comme les lecteurs le savent, je crains depuis de nombreuses années que la tolérance de la Russie à l’égard d’insultes et de provocations sans fin ne continue à encourager des provocations plus nombreuses et plus graves jusqu’à ce que des lignes rouges soient franchies, entraînant un conflit direct entre les deux grandes puissances nucléaires. Pendant toutes ces années, le Kremlin, incapable de comprendre ou d’accepter que son rôle d’ennemi n° 1 de Washington était gravé dans le marbre, s’est appuyé sur une stratégie de réponses nulles ou minimales afin d’atténuer l’image d’une Russie dangereuse et agressive déterminée à restaurer l’empire soviétique.
La stratégie désastreuse du Kremlin en Ukraine a commencé lorsque le Kremlin a accordé plus d’attention aux Jeux olympiques de Sotchi qu’au renversement du gouvernement ukrainien par Washington.
Les erreurs du Kremlin se sont accélérées lorsque le Kremlin a refusé la demande du Donbass d’être réuni à la Russie comme l’ancienne province russe de Crimée. Cela a laissé les Russes du Donbass, qui faisaient autrefois partie de la Russie, subir la persécution des milices nazies ukrainiennes, le bombardement de zones civiles et l’occupation partielle par les forces ukrainiennes de 2014 à février 2022, lorsque l’armée russe a commencé à débarrasser le Donbass des forces ukrainiennes afin d’empêcher une invasion ukrainienne préparée des républiques du Donbass. Après avoir attendu 8 ans pour agir, le Kremlin fait maintenant face à une grande armée entraînée et équipée par l’Occident ainsi qu’à des régiments nazis fanatiques.
On aurait pu penser qu’à ce moment-là, le Kremlin aurait appris de ses extraordinaires erreurs et réalisé qu’il devait enfin démontrer qu’il avait été provoqué. Sans aucun doute, ce qui était demandé était une attaque russe qui aurait fermé l’Ukraine, détruisant le gouvernement, toute l’infrastructure civile et mettant fin au conflit immédiatement. Au lieu de cela, le Kremlin a aggravé ses erreurs. Il a annoncé une intervention limitée, dont l’objectif était de chasser les forces ukrainiennes du Donbass. Il n’a pas touché au gouvernement et à l’infrastructure civile de son ennemi, permettant ainsi à ce dernier de résister à l’intervention dans des conditions très favorables.
Pour être clair, il ne fait aucun doute que les Russes peuvent débarrasser le Donbass des forces ukrainiennes et qu’ils ont pratiquement achevé cette tâche. L’erreur du Kremlin a été de ne pas se rendre compte que l’Occident ne permettrait pas que l’intervention soit limitée.
Le Kremlin a mis en garde l’Occident contre toute ingérence dans l’opération, déclarant que si les États-Unis et l’OTAN s’impliquaient, la Russie considérerait ces pays comme des «belligérants ». Mais l’Occident s’est impliqué, d’abord lentement et prudemment pour tâter le terrain, puis de plus en plus agressivement, car ce que l’Occident prévoyait à l’origine comme un conflit d’une semaine tout au plus est maintenant dans son septième mois, le Kremlin parlant à nouveau de négociations avec Zelensky et l’avance russe étant apparemment en attente. Loin de traiter les pays de l’OTAN comme des combattants, le Kremlin continue d’approvisionner l’Europe en énergie dans la mesure où l’Europe permet à la Russie de le faire. De hauts responsables russes ont parlé comme si prouver que la Russie est un fournisseur d’énergie fiable était plus important que la vie de ses soldats qui se battent contre des forces ukrainiennes entraînées et équipées par des pays européens dont les industries d’armement fonctionnent grâce à l’énergie russe.
J’ai correctement prédit que les demi-mesures russes entraîneraient l’élargissement de la guerre.
La justesse de mon analyse vient d’être confirmée par un rapport de The Hill, une publication de Washington lue par les initiés. Le rapport s’intitule «Why the US is becoming more brazen with its Ukraine support» et peut être lu ici.
Voici la première phrase du rapport et quelques extraits :
« L’administration Biden arme l’Ukraine avec des armes qui peuvent faire de sérieux dégâts aux forces russes, et, contrairement au début de la guerre, les responsables américains ne semblent pas inquiets de la réaction de Moscou. »
« ’Au fil du temps, l’administration a reconnu qu’elle pouvait fournir aux Ukrainiens des armes plus puissantes, plus performantes, plus dangereuses et plus lourdes, et les Russes n’ont pas réagi », a déclaré l’ancien ambassadeur américain en Ukraine, William Taylor, à The Hill.
« ’Les Russes ont en quelque sorte bluffé et fanfaronné, mais ils n’ont pas été provoqués. Et il y avait des préoccupations [à ce sujet] dans l’administration au début – il y en a encore dans une certaine mesure – mais la crainte de provoquer les Russes a diminué », a ajouté Taylor, qui est maintenant à l’Institut américain de la paix.
Depuis juin, les États-Unis ont régulièrement augmenté le nombre de systèmes de roquettes d’artillerie à haute mobilité (HIMARS) dans le pays, que les membres des services américains ont formé les troupes ukrainiennes à utiliser par lots. »
« À plus long terme, de nombreux rapports indiquent que les États-Unis prévoient d’envoyer prochainement des munitions d’artillerie à guidage de précision Excalibur – des armes qui peuvent parcourir jusqu’à 70 kilomètres et qui aideraient les Ukrainiens à cibler les positions et les postes de commandement russes enfouis »
« Une partie du changement de message peut être attribuée au fait que Kiev a défié les attentes internationales et n’est pas tombé rapidement lorsque la Russie a attaqué pour la première fois », selon Nathan Sales, un ancien fonctionnaire du département d’État qui a récemment occupé le poste de sous-secrétaire par intérim pour la sécurité civile, la démocratie et les droits de l’homme.
Comme je l’avais annoncé, l’opération limitée du Kremlin a été perçue en Occident comme une demi-mesure qui a donné à l’Occident l’occasion d’élargir la guerre. Maintenant, à l’approche de l’hiver, le conflit s’élargit avec des livraisons d’armes puissantes à longue portée capables d’attaquer le Donbass, la Crimée et d’autres parties de la Russie depuis l’Ukraine occidentale qui a été épargnée par l’invasion russe.
Comme je l’ai également dit, en prolongeant la guerre avec ses tactiques de ralentissement afin de minimiser les pertes civiles, une noble intention, la Russie a donné à l’Occident la possibilité de caractériser l’intervention russe comme étant à bout de souffle en raison de l’épuisement des munitions et du nombre élevé de victimes russes. L’image de l’échec russe a eu l’effet escompté de rendre l’Occident plus confiant quant à son rôle de combattant. Voici des extraits du rapport de The Hill qui le confirment :
« Une autre partie de l’équation : Des renseignements récents qui indiquent que la Russie ressent la piqûre des sanctions imposées par l’Occident et une force de service militaire qui diminue en puissance à mesure que la guerre s’éternise. »
« Le mois dernier, Reuters a rapporté que les principales compagnies aériennes russes, telles qu’Aeroflot, ont immobilisé leurs avions afin de les dépouiller de leurs pièces détachées, en prélevant des éléments de certains de leurs appareils pour maintenir les autres en état de navigabilité. »
« Et face aux pertes sur le champ de bataille, Poutine a cherché le mois dernier à augmenter les effectifs de combat de la Russie de plus de 130 000 soldats en éliminant la limite d’âge supérieure pour les nouvelles recrues et en encourageant les prisonniers à s’engager.»
« Les responsables américains pensent que cet effort a ’peu de chances de réussir’. »
« Pris dans leur ensemble, les renseignements dressent le portrait d’un pays [la Russie] qui peine à maintenir ses propres institutions, et encore moins à riposter aux nations occidentales pour avoir aidé l’Ukraine. »
« Je pense que l’instinct des gens dans les départements et les agences, en particulier l’État, la Défense et la communauté du renseignement, est d’aller plus loin et d’être plus agressif », a déclaré un ancien haut fonctionnaire du gouvernement.
« ’Nous avons beaucoup plus d’espace de notre côté, je pense, pour prendre des mesures qui aideront l’Ukraine sans avoir une peur injustifiée de la façon dont Poutine va répondre’, ont-ils ajouté. »
On peut raisonner que le Kremlin a fait toutes ces erreurs parce qu’il ne voulait pas effrayer une plus grande partie de l’Europe dans l’OTAN en démontrant ses prouesses militaires dans une conquête éclair de l’Ukraine. Mais ce sont les demi-mesures de la Russie qui ont donné à la Finlande et à la Suède la confiance nécessaire pour rejoindre l’OTAN, car elles ne voient aucune menace pour elles-mêmes du fait d’être membres de l’OTAN. Un coup dévastateur de la Russie en Ukraine aurait amené toute l’Europe à repenser l’adhésion à l’OTAN, car aucun pays européen ne voudrait être confronté à la perspective d’une guerre avec la Russie. Au lieu de cela, ce que le Kremlin a produit, c’est un Premier ministre britannique prêt à engager la Russie dans une guerre nucléaire, et une OTAN qui a l’intention de poursuivre le conflit ukrainien.
Un lecteur négligent ou hostile pourrait conclure de mon article que je suis un partisan du succès militaire russe. Au contraire, je suis un partisan de la minimisation du risque de guerre nucléaire. Steven Cohen et moi sommes les deux personnes qui, dès le début, ont vu comment l’ingérence de Washington en Ukraine avec le renversement du gouvernement traçait une voie qui pouvait aboutir à l’Armageddon nucléaire. Cohen a été honni par sa propre gauche libérale, et j’ai été déclaré « dupe/agent de Poutine ».
Les insultes que nous avons subies ont prouvé notre point de vue. Le monde occidental est aveugle aux conséquences potentielles de ses provocations envers la Russie, et le Kremlin est aveugle aux conséquences potentielles de sa tolérance des provocations. Comme nous pouvons le constater, aucune des deux parties n’a encore pris conscience de cette réalité. Le rapport du Hill démontre la justesse de mon analyse de la situation et de ma prédiction que le résultat serait un élargissement de la guerre et une plus grande probabilité d’erreurs de calcul pouvant aboutir à une guerre nucléaire.
Paul Craig ROBERTS
Source : Soutien à la rébellion du Donbass : « Quand le vin est tiré, il faut le boire ! »