Le « marché interdit », nouveau marché de dupes ?

A l’instar des multinationales agrochimiques et semencières, la grande distribution prend en otage paysans et citoyens dans un système alimentaire toujours plus industrialisé et toxique. Magie de la communication, un des leaders mondiaux du secteur (Carrefour) se poserait aujourd’hui en défenseur des semences paysannes via un certain « marche interdit »….

C’est pourtant bien les critères de cette même grande distribution qui ont concouru à l’homogénéisation des semences, et in fine à l’érosion de la biodiversité cultivée….par une propagande entretenant la confusion (1), Carrefour deviendrait un hors-la-loi, combattant main dans la main avec des producteurs et sauvant la biodiversité cultivée.

Contrairement à ce que laisse penser Carrefour qui fait large usage des termes « semences paysannes », le RSP n’est pas associé à cette campagne. Nous tenons à rappeler que le renouveau actuel des semences paysannes est dû à un travail collectif et patient, issu d’une diversité de regards et d’une mutualisation des savoir-faire : une démarche à l’opposé des stratégies marketing de l’agro-business à l’affût de nouvelles niches commerciales à exploiter ou d’initiatives écocitoyennes à récupérer pour se verdir la façade.

Une très grande majorité des producteurs du RSP commercialisent leurs produits issus de semences paysannes en circuit court. Ils entretiennent une diversité sans commune mesure avec les quelques variétés en tête de gondole proposées par Carrefour ou celles mises en avant par le GNIS (2), qui, par un opportunisme éhonté, profite au passage de la vague du greenwashing et se pose lui aussi en chantre de la biodiversité cultivée (3).

Par ailleurs, les revendications des praticiens (4) ne se limitent pas un assouplissement du Catalogue qui reste avant tout un outil au service du monopole radical exercé par l’industrie sur les semences.

Nous avons pour ambition, dans notre diversité, de construire collectivement et de manière horizontale nos revendications. A ce titre, il est particulièrement malvenu qu’un acteur si important soit-il dans la filière parle au nom de l’ensemble des praticiens des semences paysannes sans les consulter.

Pour ces raisons, nous invitons donc le consommateur, cible malgré lui de cette campagne à ne pas être dupe et à plutôt nous rejoindre pour reprendre en main son destin de mangeur, à l’heure où quelques multinationales sont en passe de breveter l’ensemble de l’alimentation (5).

Contacts :

Philippe Catinaud, Co-Président du RSP : 06 37 80 97 66
Patrick de Kochko, Coordinateur du RSP : 06 17 06 62 60

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(1) Les « légumes interdits » ne le sont pas. De plus, dans la réglementation actuelle sur les échanges de semences, il subsiste quelques ouvertures : échanges pour des travaux de sélection, vente pour un usage non commercial. Depuis août 2016, les échanges de semences paysannes sont possibles dans le cadre de l’entraide agricole.

(2) Groupement National Interprofessionnel des Semences.

(3) L’importance des 350 variétés de potagères inscrites sur la liste Sans Valeur Intrinsèque mises en avant par le GNIS est toute relative au regard des milliers non inscrites qui circulent et sont cultivées aujourd’hui en France dans les petites fermes et les jardins vivriers, mais aussi au regard du rôle historique du catalogue comme outil « d’épuration variétale ». Enfin, le nombre total de variétés inscrites (7000) est lui aussi très relatif : il ne prend pas en compte leur diversité intra-variétale qui est en l’occurrence nulle (clones ou quasi clones).

(4) 10 mesures pour que vivent les semences paysannes ; notamment interdiction du brevet sur les plantes.

(5) Trois entreprises mondiales de l’agrochimie contrôleraient 60 % du marché des semences et des produits agrochimiques : Bayer-Monsanto, DuPont-Dow et Syngenta-Chemchina. Source : Inf’OGM

 

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