Les retraités dans la rue contre la hausse de la CSG

À l’appel de neuf syndicats, les retraités défilent ce jeudi dans plusieurs villes de France, pour protester contre la hausse de la CSG sans contrepartie.

«On nous demande encore un effort» alors qu’»on n’est pas des nantis»: quelques milliers de retraités sont réunis aujourd’hui dans plusieurs villes, en protestation à la décision du gouvernement d’augmenter la Contribution sociale généralisée (CSG) à partir du 1er janvier prochain. Cette taxe doit passer pour les retraités de 6,6% à 8,3% de la pension qu’ils perçoivent, et ferait perdre environ 400 euros par an pour un couple touchant 2000 euros de retraite par mois.

Alors que les manifestant parisiens viennent de partir de la place de l’Opéra, plusieurs milliers de retraités se sont réunis en province dès ce matin. Les cortèges les plus importants ont réuni environ 2.000 personnes à Bordeaux, 850 à Toulouse et 700 à Brest, selon la police, ou encore 1.000 à Rouen (chiffre organisateur). Ils étaient également quelques centaines à Rennes (250), Reims (300), Strasbourg (300) et Besançon (400 à 700 personnes selon les sources). «Certains d’entre nous sont tout cassés de leurs années de travail et on nous demande encore un effort, c’est inadmissible», estime Christine Diebold, 59 ans, ancienne aide-soignante croisée dans la manifestation de Strasbourg.

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Les syndicats attentifs, les étudiants «solidaires»

Neuf syndicats de retraités CGT, FO, CGC, CFTC, FSU, Solidaires, FGR, et les assos UNRPA, LSR appellent à une mobilisation massive pour faire reculer le gouvernement. Jean-Claude Mailly a rappelé que FO manifesterait aujourd’hui, ce que l’organisation n’a pas fait officiellement contre la réforme du droit du travail. Dans un communiqué, la CGT exige l’annulation des mesures prises, et d’autres mesures tels qu’une augmentation de la pension de réversion, le retour à une revalorisation, etc. Laurent Berger, pour la CFDT, dénonce quant à lui la «promesse non tenue de gain de pouvoir d’achat pour les fonctionnaires» et les efforts demandés aux retraités qui touchent 1200 euros de pension. De même, il semble que la cause des seniors mobilise jusqu’aux étudiants, engagés pour le maintien ou l’amélioration des droits sociaux: plusieurs assemblées générales étudiantes ont eu lieu ces derniers jours, à Nanterre, Paris-1, Paris-3 ou encore Sciences po, qui ont décidé d’apporter leur soutien et leur présence à la manifestation d’aujourd’hui, par solidarité «inter-générationnelle».

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De son côté, la Confédération Française des Retraités (CFR), syndicat spécialisé, souligne les mesures fiscales qui ont ciblé les retraités ces dernières années (suppression de la demi-part dite des veuves, taxation des majorations de retraite pour enfants). Craignant un «ostracisme», l’organisation demande la suppression de la cotisation d’assurance maladie de 1%, mais également la déductibilité des cotisations des complémentaires santés du revenu imposable, à laquelle ont droit les salariés. Générations Mouvement, une autre organisation, se dit «consciente des nécessités économiques actuelles» et, si elle n’est pas opposée à fournir un effort complémentaire», appuie néanmoins les demandes de la CFR.

Sur RTL ce matin, le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin rappelait néanmoins que l’augmentation de la CSG sera pour de nombreux retraités compensée par la baisse voire la suppression de la taxe d’habitation.

Les retraités dans le collimateur des pouvoirs publics

Le mouvement de grogne n’est pas nouveau, et la question du pouvoir d’achat des retraités fait l’objet d’un mouvement des syndicats depuis juin 2014, avec des manifestations quasi annuelles. La hausse de la CSG intervient alors que les retraités ont donc l’impression d’être dans le collimateur des pouvoirs publics depuis plusieurs années. Il n’y a pas eu de revalorisation sensible des pensions depuis 2013 (+1,3%). L’année suivante elle avait été de 0,1% seulement, puis plus rien en raison d’une inflation elle-même quasi nulle. Cette année, un gain de 0,8% est prévu, dès le 1er octobre, encore une fois calqué sur l’inflation. Le gouvernement prévoit d’ailleurs de reporter d’octobre 2018 à janvier 2019 cette hausse. De même, pendant le quinquennat de François Hollande, une taxe supplémentaire avait été créée, la Contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, de 0,3% des pensions.

La CSG touchant les retraités reste néanmoins moins élevée que celle des actifs qui va passer à 9,2%. Les pensions les plus modestes bénéficient en outre d’un taux réduit, de 3,8%. Cependant, pour les retraités, pas de contrepartie en baisse de charges.

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Une population en risque de paupérisation

Il reste bien quelques autres avantages aux retraités, comme l’abattement pour frais professionnels, alors qu’ils n’en ont plus, mais dans l’ensemble, les perspectives sont assez sombres pour le régime des retraites. Selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse, plus de 14 millions de personnes touchaient une pension de retraite au 31 décembre 2016. Il y a quinze ans, ce chiffre était d’environ 10 millions. Le rapport démographique a bien changé: en 1964 il y avait 4,4 cotisants pour un retraité, en 2013 il n’y en avait plus que 1,3. Leur taux de pauvreté est encore de 7% quand celui de la population est de 14%, mais il est clair qu’à moyen et long terme, les retraités ne pourront pas être aussi bien traités qu’actuellement, sauf à des efforts conséquents de la collectivité. Selon Philippe Crevel, interrogé par France Info ce matin, «les retraités devraient perdre 5 à 15% de pouvoir d’achat» sur les vingt prochaines années. Pour l’économiste, l’augmentation de la moyenne des pensions est également un leurre: c’est le fruit de l’arrivée des femmes dans le monde du travail qui fait monter le niveau moyen des pensions, mais le taux de la pension sur le salaire antérieur, lui, va continuer de baisser.

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