Crise des opioïdes aux États-Unis: McKinsey accepte de payer 230 millions pour mettre fin aux poursuites
Les contentieux de McKinsey dans le scandale des opioïdes aux États-Unis n’en finissent pas. Après avoir payé 640 millions de dollars en 2021 pour solder les poursuites de nombreux États fédéraux américains, le cabinet de conseil a accepté de régler 230 millions de dollars supplémentaires pour mettre fin aux poursuites qui le visent. Selon des documents judiciaires déposés mardi 26 septembre, 207 millions de dollars seront versés aux gouvernements locaux et 23 millions sont destinés aux districts scolaires publics (autorité chargée de la gestion des écoles sur un territoire déterminé, NDLR) .
Les opioïdes sont des médicaments à base de substances psychoactives qui agissent sur la partie du cerveau responsable du contrôle de la douleur. Les traitements peuvent être prescrits sous différentes formes comme la codéine, le fentanyl, la morphine ou encore l’oxycodone, la substance à l’origine de la crise des opioïdes aux États-Unis. Développé et commercialisé sous le nom OxyContin par le laboratoire privé Purdue Pharma, ce puissant analgésique est derrière le décès de plus de 600 000 personnes aux USA entre 1999 et 2021, selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC). Douze millions d’Américains en seraient aussi devenus dépendants.
Près de 900 millions de dollars pour mettre fin aux poursuites
Des milliers de poursuites judiciaires ont été intentées par des collectivités, des écoles, des communautés autochtones et des citoyens américains, particulièrement les parents d’enfants nés avec des symptômes de sevrage. Les laboratoires pharmaceutiques sont accusés d’avoir minimisé les risques liés aux opioïdes. Selon les plaignants, les distributeurs ont ignoré les signaux d’alarme tandis que le cabinet de conseil McKinsey a élaboré des stratégies de commercialisation agressive et des plans marketing “trompeurs” afin de “maximiser les revenus” de ses clients.
Les poursuites ont abouti au paiement, par les principaux fabricants et les distributeurs, d’un total de plus de 51 milliards de dollars. McKinsey a de son côté réglé en 2021 la somme de 640 millions de dollars pour se dégager des contentieux avec les procureurs généraux de 50 États américains.
Ce n’est pour autant pas la fin des poursuites contre le cabinet de conseil dans cette affaire. Selon des documents déposés mardi 26 septembre auprès du tribunal, McKinsey a accepté de payer 230 millions de dollars supplémentaires pour mettre fin à ses contentieux, cette fois-ci avec les comtés et les municipalités d’une part, les districts scolaires publics, d’autre part. Deux-cent sept millions de dollars devront être versés aux premiers et 23 millions de dollars aux seconds.
Toutefois, cet accord doit encore être approuvé par un juge. Avocate des gouvernements locaux, Aelish Baig estime que cet accord est un “résultat solide pour les communautés touchées par cette crise”.
Les scandales à répétition de McKinsey
Le cabinet de conseil a toujours affirmé que son travail était “légal”. En 2019, McKinsey a annoncé avoir cessé d’offrir ses services sur les affaires liées aux opioïdes.
Quant à Purdue, principal responsable de cette crise sanitaire aux États-Unis, la justice américaine a approuvé en 2021 un accord mettant fin aux nombreuses poursuites judiciaires visant ce laboratoire pharmaceutique. Le plan prévoyait le versement de 10 milliards de dollars de pénalités, dont 4,5 apportés par le propriétaire historique de l’entreprise, à savoir la famille Sackler.
L’accord a été suspendu en août dernier par la Cour suprême, qui a relevé que cette famille était exonérée de toute future plainte de la part des victimes.
Outre la crise des opioïdes aux USA, McKinsey est associé à de nombreux autres scandales, tant sur la scène internationale que sur la scène nationale. Le cabinet a contribué à la crise financière de 2008 après avoir encouragé les banques à transformer les crédits immobiliers de leurs clients en titres adossés à des créances hypothécaires, une technique consistant à transférer le risque de non-paiement des hypothèques aux investisseurs qui en ont fait l’acquisition.
En France, le cabinet fait l’objet de trois enquêtes de la part du Parquet national financier (PNF) après avoir été accusé fin 2022 par la commission d’enquête du Sénat d’optimisation fiscale entre 2011 et 2020. La première enquête vise McKinsey pour “blanchiment aggravé de fraude fiscale” tandis que les deux autres informations judiciaires portent sur l’intervention du puissant cabinet dans les campagnes électorales de 2017 et 2022 du président de la République.
Le PNF a annoncé avoir mené plusieurs perquisitions aux sièges parisiens de McKinsey, du parti Renaissance et de son association de financement dans le cadre des enquêtes sur les conditions d’intervention des cabinets de conseil, notamment dans les campagnes électorales d’Emmanuel Macron en 2017 et 2022.
Les liens du président de la République avec McKinsey font aussi l’objet d’instructions, pour soupçons de favoritisme et recel de favoritisme. Les contrats passés entre l’État et différents cabinets ont « plus que doublé » entre 2018 à 2021, atteignant un montant record de plus d’un milliard d’euros en 2021.