Leçons de l’échec du mouvement « Manif Pour Tous »

Au printemps 2013, avec la loi Taubira, l’autoritarisme étatique imposa une loi destructrice de civilisation tendant à l’indifférenciation sexuelle et à la négation de la Nature.  Il était déjà clair, à cette date, que le Parti socialiste était à la pointe de l’oppression sociale et politique, les mois qui ont suivi n’ont fait que renforcer ce constat.

Ce parti et ses forces supplétives (médias de propagande et groupuscules ou associations gauchistes) agissent d’une part pour renforcer  l’oppression économique des Français par leur mise en esclavage, grâce à une dette artificielle, d’autre part pour accélérer l’oppression psychologique, par le biais d’un projet chargé d’inhiber la construction de l’individu autonome. La loi de dénaturation du mariage est en effet un élément-clef d’une stratégie d’organisation d’un chaos global, portant atteinte à la subjectivité individuelle. Passivité, déracinement, perte de repères, tendance à la dépression, liens sociaux et familiaux fragilisés sont les objectifs d’une oligarchie qui souhaite sécuriser son pouvoir sur le long terme. Pour parvenir à ses fins, elle dispose désormais de la technologie et des médias de masse à un niveau de développement tel qu’elle ne peut résister à la tentation d’une oppression renforcée. Pour ces néo-totalitaires, l’individu conscient et capable d’esprit critique, nouant librement des liens avec sa collectivité, représente l’ennemi à abattre, l’éternel opposant potentiel dont il faut empêcher la naissance.

Les totalitarismes du XXème siècle ne renaîtront pas. Ils seraient désormais d’une totale inefficacité, et seule l’imbécillité gauchiste entretenue peut encore dénoncer la fiction de leur menace, passant dès lors à côté de la nouvelle forme de totalitarisme qui se met en place insidieusement, mais implacablement. Désormais, le néo-totalitarisme vise à reprogrammer l’individu de manière à le contrôler de la naissance à la mort en altérant efficacement son individualité par l’analphabétisme, l’abrutissement médiatique, le pseudo-divertissement décérébrant, le déracinement, ou encore la perte de l’origine biologique. Le projet d’artificialisation de l’existence individuelle entame sa marche déshumanisante, de la conception par le laboratoire à la disparition par le suicide assisté et l’euthanasie. Le contrôle social totalitaire décrit par Aldous Huxley dans son « Meilleur des mondes » n’est plus du seul ressort de la fiction littéraire, mais devient progressivement réalité. De plus, ce projet d’asservissement se pare de mots et de concepts falsifiés et vidés de leur sens, comme la liberté, l’égalité, l’amour et l’épanouissement individuel. L’utilisation à outrance d’un langage dénaturé permet ainsi d’accélérer l’invasion des consciences. L’infantile « jouir sans entraves » récupéré par la publicité et les médias est revisité par l’État moderne et s’avère même d’une grande utilité pour ces oppresseurs d’un type nouveau.

La société néo-totalitaire, reflet de la dictature de l’Économie sur les hommes, ne peut tolérer que la réalité objective d’une Nature persiste à lui échapper dans un quelconque secteur. La falsification s’est donc imposée partout, de la nourriture de masse à l’air que l’on respire, de la culture muséifiée à l’aménagement de l’espace et, désormais, jusqu’à la possibilité de rencontre et à la sexualité. Tout doit passer sous les fourches caudines du profit et de la marchandisation, y compris l’identité biologique et sexuelle des individus. En effet, au supermarché des pseudo-choix des êtres atomisés de l’avenir, il sera possible de choisir son sexe et d’en changer avec enthousiasme selon l’opportunité offerte par les rendez-vous festifs imposés par le Pouvoir.

Le meilleur moyen de fabriquer en série des individus soumis consiste à leur retirer toute possibilité d’identification à une culture, à une langue, à une histoire, à un territoire, à une origine biologique avec père et mère identifiés, et même à un sexe défini. L’homme nomade vanté par un Attali, sans attaches, dénué de passé et d’avenir, socialement fragilisé, est sciemment planifié. Toujours plus en déshérence, il sera livré à son seul narcissisme, à la consommation d’images, de flux sonores en continu et d’antidépresseurs. La culture « hors sol et hors sexe » du néo-individu répond à une feuille de route rédigée par ces totalitaires d’un genre nouveau, qui se parent des attraits usés d’un hédonisme de bazar et d’une apologie de l’amour estampillé par L’État.

Longtemps cible de la critique et de l’opposition aux pouvoirs en place, la famille fut perçue par certains comme l’unité de base de l’oppression, garante d’un ordre moral honni. C’est sans doute l’une des erreurs les plus absurdes des mouvements critiques du XXème siècle, et cet acharnement sur la famille constituait finalement l’expression d’une vision bornée, signe de reconnaissance pour des « petits-bourgeois » à la recherche d’une posture de révolté.  Pourtant, la famille, base naturelle de la vie en société, demeure l’unité la plus apte à protéger l’individu. En effet, malgré sa fragilisation par le divorce et l’immixtion massive du spectacle médiatique et du divertissement de masse en son sein, elle est un obstacle à l’avancée du Marché et à la formation des profits. Par conséquent, la famille doit être dénaturée, voire détruite, transformée en de nouvelles formules d’associations, microgroupes à durée de vie réduite, ersatz appauvris et dégradés de la famille originelle. Le Pouvoir, ayant bien compris que le désordre moral et le relativisme nihiliste représentaient des outils de contrôle social particulièrement efficaces, a donc tout naturellement fait de la famille sa cible privilégiée. Le projet de déconstruction va s’accélérant, élément-clef sur lequel  aucun recul n’est envisageable. Dans l’optique de tétaniser les foules placées devant le fait accompli, la production d’irréversibilité est devenue une technique de gouvernement.

Ce projet, le Parti Socialiste est le mieux à même de le mettre en pratique, à la différence des partis de droite, qui partagent, certes, les mêmes choix économiques ultra-libéraux, mais sont encore bridés par un électorat rétif aux bouleversements nihilistes du « tout se vaut » et à la destruction programmée de toute common decency chère à George Orwell.  La Gauche use, quant à elle, d’une remise en question permanente des mœurs afin d’occulter la question sociale. Elle rencontre toujours  une complicité insolente et puérile à l’extrême-gauche, dont l’absence totale de culture politique reste la caractéristique principale. Le gauchisme des années 70, qui manifestait déjà à cette époque son incompréhension complète de l’oppression moderne, a logiquement engendré des successeurs toujours plus dérisoires, enfants du festivisme, de la banalisation des drogues et d’un relativisme libertaire de salon, aboutissant à un stade encore plus avancé d’inconscience politique et de bêtise individuelle.

Face à cette nouvelle oppression totalitaire qui fonctionne à partir d’ingrédients tels qu’une fausse liberté sexuelle mortifère, la banalisation des drogues, le relativisme moral et la jouissance marchande instantanée, le « peuple de gauche » se retrouve totalement démuni. Gavé à l’idéologie festive pendant trois décennies, il est incapable d’opposer la moindre résistance au rouleau compresseur relativiste du politiquement correct le plus autoritaire. Alors, dans une France en décomposition, seules les familles catholiques, toutes générations confondues, solidement ancrées sur l’exigence de dignité humaine, ou encore l’ensemble des individus plutôt orientés idéologiquement à droite, ont composé l’immense majorité des rangs  d’un mouvement de résistance parcellaire aux projets liberticides actuels.

Force est de constater que ce mouvement a échoué. Toutes les lois iniques ont été votées et continuent de l’être sans problème majeur (loi sur la « fin de vie » récemment par exemple ou loi Touraine à venir avec ses nombreuses incidences allant du prélèvement d’organes aux salles de shoot). L’opposition a reflué. Cet échec était prévisible.

D’une part, la représentation bureaucratique du mouvement, l’organisation dite de la « Manif pour tous », noyautée par l’UMP et autres partis de droite, avait pour objectif de gérer le mécontentement pour le drainer vers un vote de droite dans les rendez-vous électoraux à venir. Sa fonction pseudo mobilisatrice s’apparente d’ailleurs, dans un autre registre, au rôle assumé par les syndicats de salariés dans l’expression d’une fausse résistance sociale. En effet, les syndicats depuis des décennies organisent des manifestations de rue pour simuler l’opposition sociale et réussissent avec les mêmes procédés à épuiser leurs troupes dans un vaste simulacre de contestation. La pulsation des rendez-vous de rue est parfaitement étudiée pour donner dans un premier temps l’impression d’une illusion de puissance d’une foule qui gonfle et se compte. Mais très vite, les rendez-vous des manifestants se font plus espacés, plus ramollis, plus policés, et c’est la débandade. Là aussi toutes les réformes se mettent en place irrésistiblement, reculs sociaux en tous genres à la clef. L’opposition à la réforme des retraites en est un exemple récent des plus illustratifs.

Les cortèges de rues font appel aux mêmes ingrédients festifs : ballons gigantesques aux couleurs chatoyantes, podiums avec sonos puissantes, marches où s’imposent musique décérébrante, chansons débilitantes, slogans infantiles d’où toute radicalité ou même toute intelligence est bannie. Ce ne sont plus des manifestations de colère mais des cortèges de foire avec vente de matériel à l’appui (t-shirts, badges, …). La démobilisation finit tout naturellement par s’imposer dans un contexte d’attente puérile des images du Journal de 20 heures censées démontrer la force du mouvement. Mais ces images n’apparaissent jamais ou sont falsifiées d’une manière ou d’une autre.

Enfin, en dehors de cette trahison objective de la part des organisateurs de la fausse critique, la deuxième raison de cet échec s’explique par la prise de conscience limitée des opposants à la loi sur « le mariage pour tous ». En effet, à l’exception d’une infime minorité, ces derniers sont incapables d’identifier le véritable moteur du néo-totalitarisme en marche : la marchandisation forcée de l’ensemble de la vie humaine, à des fins lucratives et répressives, de la naissance à la mort, jusqu’à l’intimité biologique et psychologique des individus. Si l’on souhaite s’opposer à des lois de dénaturation du mariage, à l’artificialisation de la procréation, à l’euthanasie au nom de valeurs morales outragées et au nom de la dignité humaine, il convient de percevoir l’origine du Mal. Ce dernier naît tout naturellement d’une volonté d’oppression basée sur le profit et la froide déraison marchande, il est propre au système capitaliste. Mais il est évident qu’il est devenu impossible de  nommer ce système, il faut désormais parler d’économie de marché », de « libéralisme », da « mondialisation » heureuse des échanges. Peu importe le vocable, il s’agit de la même réalité. Ceux qui s’opposaient à juste titre à ces lois furent malheureusement aussi ceux qui en majorité n’avaient jamais exprimé la moindre critique à l’égard des exactions du Capital et de la société industrielle. Bien au contraire, ils en sont souvent de fervents admirateurs ou apologistes. Ainsi, n’ayant pas perçu l’origine de ces lois et la logique intrinsèque au système qui les a produites, ils ne pouvaient élaborer le discours critique susceptible de relever le défi de ces bouleversements dans les mœurs. En pareille occurrence, on ne peut que rappeler la lucidité de Bossuet dont la sentence est toujours plus d’actualité : « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes ».

Le « meilleur des mondes », ce cauchemar déshumanisant actuellement en progression, peut être vaincu. Mais cette victoire suppose la perception préalable de la complémentarité étroite qui lie deux domaines en apparence séparés : d’une part l’oppression politique et économique du Capital mondialisé devenu nihiliste, d’autre part l’oppression psychologique et spirituelle qui œuvre à la dénaturation globale des mœurs et au recul de l’intelligence moyenne.

Dette des États, destruction des enseignements à l’école et théorie du genre appartiennent à la même feuille de route.

L’espoir d’un monde qui préserve la dignité humaine et s’oppose à la réification, pour le bien des générations futures, réside dans notre aptitude à saisir toutes les composantes du projet de l’adversaire afin de déjouer l’avenir funeste conçu par une oligarchie dénuée de tout scrupule.

Peuple de France résistant, encore un effort pour devenir révolutionnaire !

Patrick Visconti

Article initialement paru dans le numéro 70 de la revue Rébellion.

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