Macron ampute le budget de la Défense de 850 millions
De deux choses l’une : ou bien le ministre du Budget Gérald Darmanin s’est avancé en donnant comme acquis une réduction du budget militaire non validé par le président de la République. Ou bien ce dernier fait lancer par le gouvernement une petite bombe destinée à faire savoir qu’en matière de défense, ses engagements visant à porter le budget à 2 % du PIB (contre 1,7 % aujourd’hui) ne seront pas tenus.
Dans Le Parisien du 11 juillet, Gérald Darmanin indique avoir « demandé au ministère de la Défense de tenir le budget qui a été voté en 2017 par le Parlement, ce qui entraîne une réduction des dépenses de 850 millions d’euros. (…) Le budget ne diminue pas, mais l’enveloppe votée devra être respectée. » La clé de ce discours se trouve à la fin : « Il faudra assurer le financement des opérations extérieures en trouvant des économies ailleurs. » La ministre des Armées, Florence Parly, qui joue ces jours-ci sa crédibilité auprès des militaires, a annulé mardi un déplacement à Mont-de-Marsan pour participer à des discussions gouvernementales sur le sujet.
Il n’est par définition jamais possible de définir précisément lors de la préparation du projet de loi de finances (PLF), voté à l’automne pour l’année suivante, ce que seront alors les besoins financiers des opérations extérieures (Opex). Concrètement, le budget de la Défense de l’année 2017 intègre 450 millions d’euros pour les Opex. Or en 2017, alors que cinq mois et demi restent à courir, ces budgets sont déjà engloutis puisqu’il faudra au total entre 1,2 et 1,3 milliard d’euros pour financer ces opérations. Différence : 850 millions d’euros. Précisément la somme que le ministre du Budget veut faire payer à sa collègue Florence Parly.
Depuis des décennies, Bercy exige que ces suppléments annuels récurrents soient supportés par les seules armées, qui doivent donc se battre en espérant que leur ministre aura le poids nécessaire. Ils ont souvent obtenu, mais pas toujours, que ce budget supplémentaire soit supporté par le budget général. C’est pour cette raison que l’article 4 de la dernière loi de programmation militaire stipule que les surcoûts des Opex « font l’objet d’un financement interministériel ».
L’affaire est si sérieuse qu’Emmanuel Macron alors candidat s’était précisément et explicitement exprimé sur le sujet en annonçant, le 18 mars 2017, une augmentation du budget militaire : « Ce budget atteindra, hors pensions et hors surcoûts Opex, plus de cinquante milliards d’euros en 2025, contre trente-deux en 2017. Mais je juge que cet effort est indispensable, mieux, qu’il est urgent. Nous ne pouvons pas attendre, en raison de l’environnement que j’ai décrit et des besoins de nos armées. Le renouvellement des forces de dissuasion, la modernisation des moyens militaires conventionnels, le comblement de certains déficits criants dans nos capacités rendent absolument indispensable cet effort. »
Contrairement à ce que semblent penser les fonctionnaires de Bercy, les armées ne sont pas une vache à traire. Les Opex en cours sont conduites dans des conditions souvent très difficiles, les moyens engagés étant supérieurs d’un tiers aux capacités françaises prévues dans le « contrat opérationnel » des forces françaises. Les équipements sont en surchauffe, et les hommes aussi. À côté de matériels ultramodernes, des moyens souvent vétustes et sous-entretenus sont envoyés sur le terrain. Les membres du personnel sont épuisés et leurs entraînements ont été réduits. Leurs équipements individuels ne sont pas à la hauteur.
Réductions temporaires de capacité
Refuser que l’État prenne en charge le surcoût des Opex, pour les faire payer par le budget des armées, en leur imposant de régler sur leur substance les fameux 850 millions d’euros, n’est pas une petite affaire. 850 millions, c’est l’équivalent de 8 avions Rafale. Bercy a sa petite idée : il serait possible de mettre en place des réductions temporaires de capacité (RTC), prévues par la loi de programmation militaire. Mais de telles impasses militaires se payent un jour très cher sur le terrain, quand la France n’est plus en état de conduire les missions qu’elle souhaiterait mener.
Il va falloir choisir : soit les autorités politiques, président de la République et Premier ministre en tête, veulent poursuivre les engagements extérieurs français tout en maintenant les capacités militaires nationales à leur niveau actuel. Soit, comme ils en ont la possibilité, ils réduisent la voilure militaire française et cessent de l’engager au coup de sifflet, en tout temps et en tous lieux, comme ils le font actuellement.
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