Pourquoi Olivier Marleix s’interroge sur le financement de la campagne d’Emmanuel Macron
Propos recueillis par Laurence Dequay
Olivier Marleix est député LR de l’Eure-et-Loir, ancien président de la commission d’enquête à l’Assemblée nationale sur la politique industrielle de la France de novembre 2017 à avril 2018.
Marianne : Vous avez été entendu le 29 mai dernier par les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) car vous aviez signalé en janvier dernier les opérations de vente des activités énergie d’Alstom à General Electric et la fusion Technip-FMC à la justice. Pourquoi cette démarche ?
Olivier Marleix : J’ai signalé ces opérations au parquet de Paris parce que le fait que l’on puisse retrouver dans la liste des personnalités qui ont contribué financièrement et opérationnellement à la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron des acteurs intéressés à cette vente et cette fusion serait, si cela est avéré, problématique. Des faits dont je n’ai pris connaissance, notamment par un article de Marianne joint à mon courrier, qu’en mai 2018. En droit, ces dons, mêmes réalisés sous une forme légale, pourraient constituer un « pacte de corruption » ou une « prise illégale d’intérêt ».
« Pendant ses deux années à Bercy, M. Macron a autorisé des fusions pour des montants colossaux »
Les sommes en jeu dans ces fusions sont immenses : dans la vente d’Alstom power à GE, du seul côté d’Alstom les « coûts de l’opération » avoisinaient les 300 millions d’euros, souvent en success fees (des primes au résultat en somme, NDLR). Pour une banque d’affaire l’enjeu s’élève à 10 ou 15 millions d’euros.
Pendant ses deux années à Bercy, M. Macron a autorisé des fusions pour des montants colossaux. Alstom-GE : 13 milliards d’euros. Alcatel : 15 milliards. Lafarge : 17 milliards. Technip : 8 milliards. Cette accélération de l’histoire est inédite… Que les financiers de la campagne, MM. Kohler et Denormandie aient été en charge de ces dossiers au cabinet souligne le mélange des genres !
Mais ces ventes ont été autorisées par l’Etat ?
Oui, c’est bien le problème ! Elles ont été examinées d’une part par le ministère de la Défense pour des activités le concernant, notamment les turbines qui équipent nos sous-marins et, d’autre part, par le bureau « Multicom 2 » de Bercy. Mais comme notre commission d’enquête l’a révélé, cette procédure de contrôle des investissements étrangers en France, actualisée par le décret d’Arnaud Montebourg, est largement contournée.
On peut s’étonner que lors de la fusion Technip-FMC, BPIfrance participations et l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles, aient renoncé aux droits de vote doubles que leur procuraient leurs 6,16 % et 2,31 % respectifs. Qu’en pensez-vous ?
J’ignorais que l’Etat français s’était ainsi affaibli pour que cette fusion puisse se faire dans une société cotée à Londres. Quand on voit les difficultés rencontrées par Bruno Le Maire, l’actuel ministre de l’Economie pour contraindre des multinationales à s’acquitter de leurs obligations, je m’interroge sur ce renoncement…
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