Une nouvelle filière de fraude sociale : les fausses reconnaissances de paternité
Article du 05/01/2015
Quelques mois auparavant, à Nantes, les policiers avaient démantelé un réseau très structuré de Congolais et de Nigérians qui, moyennant 15 000 euros, acheminait quant à lui des clandestins et recrutait des ressortissants français, le plus souvent naturalisés, qui acceptaient, en contrepartie de plusieurs milliers d’euros, de reconnaître indûment des enfants de mères nigérianes en situation irrégulière afin que les bambins puissent prétendre au certificat de nationalité française et que leurs mères se voient délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire «vie privée et familiale». En région parisienne, la police a réussi à démasquer un homme de 47 ans qui a quant à lui reconnu avoir déclaré seize paternités frauduleuses, ayant permis de détourner un peu plus de 400 000 euros d’aides sociales.
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Parfois, ce sont même des clandestins qui bourse délient pour devenir père d’un enfant français et emprunter, à leur tour, le chemin de la régularisation. Ainsi, à Marseille, la police aux frontières a démantelé en décembre 2013 une filière d’aide au séjour irrégulier par reconnaissance indue d’enfants, agissant au profit de ressortissants algériens, tunisiens et marocains. «Ce réseau, dirigé principalement par deux organisateurs, recrutait des mères isolées, en grandemisère sociale, puis les mettait en contact avec des hommes en situation irrégulière en France, explique un policier. Un intermédiaire ou l’un des organisateurs accompagnait le faux couple en mairie pour effectuer les démarches administratives de reconnaissance de paternité, permettant ainsi aux clandestins d’obtenir un titre de séjour. Pour chaque enfant ainsi reconnu, parfois même avant la naissance, la somme d’environ 3 000 euros – 2 000 euros pour la mère et 1 000 euros pour les organisateurs – était réclamée aux faux pères.»
Selon un dernier bilan porté à la connaissance du Figaro,«les préfectures déclarent en moyenne chaque mois plus d’une vingtaine de cas. Certains pères reconnaissent jusqu’à quarante enfants». Le record avait été battu en 2010, lorsqu’un homme de 54 ans avait été interpellé à Paris pour avoir déclaré 55 paternités frauduleuses ayant permis de détourner près d’un million d’euros. Moins gourmand que ses successeurs, ce pionnier avait avoué aux policiers se faire rémunérer entre 150 et 200 euros par enfant reconnu. Certaines femmes, jurant contre l’évidence que l’homme interpellé était le père biologique de l’enfant, déclaraient percevoir jusqu’à «7 500 euros mensuels d’allocations diverses».
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Sur le front judiciaire, la traque s’intensifie. Les démantèlements de filières usant de cette méthode sont de plus en plus nombreux, passant de cinq à douze entre 2013 et l’année dernière. Par ailleurs, la police planche sur une quinzaine d’autres dossiers analogues. Les trafiquants interpellés encourent cinq ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amendes. La peine monte à dix ans et 750 000 euros d’amendes quand le trafic est commis en bande organisée. Comme les mariages bidons, les «paternités» blanches sont désormais dans le viseur.