«BFM, collabos»: trois journalistes conspués à la mobilisation toulousaine des Gilets jaunes

Hués, conspués et insultés place du Capitole à Toulouse lors de la manifestation des Gilets jaunes, trois journalistes de BFM TV et CNews ont porté plainte pour «violences aggravées» et «tentative d’agression en réunion» .

«Maintenant vous dégagez, sinon on vous défonce» : c’est en ces termes que l’équipe de correspondants de BFM TV a été menacée sur la place du Capitole, à Toulouse, où s’achevait une manifestation des Gilets jaunes, peut-on lire sur le site de la chaîne. Avec leurs collègue de CNews, trois journalistes ont  annoncé avoir porté plainte le 24 novembre pour «violences aggravées» et «tentative d’agression en réunion».

Dans une vidéo publiée sur le compte Facebook des Gilets jaunes de Toulouse, on voit les deux journalistes de BFM TV et leurs trois confrères de CNews hués et pris à parti par une foule hurlant «BFM, collabos!».

«Je suivais la manifestation au Capitole et je me suis fait courser», a raconté à l’AFP le journaliste de BFM TV, Jean-Wilfrid Forquès, qui a porté plainte avec son collègue reporter d’images Maxime Sounillac pour «tentative d’agression en réunion». Sous l’injonction de deux gardes de sécurité qui l’accompagnent depuis une semaine, le journaliste de 53 ans a dû courir pour échapper à ses assaillants.

L’organisateur dément les violences

«C’était un véritable lynchage, et la cible c’était BFM TV», a-t-il déclaré, ajoutant : «Ça a dégénéré dès qu’ils ont vu BFM TV sur le terrain». Cependant, l’administrateur de la page Facebook où a été publiée la vidéo ci-dessus assure dans un commentaire qu’il n’y a eu aucune violence.

«BFM, collabos»: trois journalistes conspués à la mobilisation toulousaine des Gilets jaunes (VIDEO)
Capture d’écran.

Sur l’une des plaintes dont l’AFP a eu une copie, le journaliste de CNews, Jean-Luc Thomas, raconte avoir subi l’assaut d’un groupe de 50 à 100 manifestants qui criaient «Journalistes, collabos !» alors qu’il se trouvait avec «cinq ou six journalistes». «Au même moment, plusieurs personnes ont commencé à me donner des coups de pied et me pousser afin de me faire chuter», écrit-il dans le procès-verbal de police.

Le reporter de CNews a précisé à l’AFP avoir reçu des coups de pied, des crachats et une bouteille d’eau en plein visage, avant d’être «coursé» dans une rue adjacente, sans toutefois être blessé.

Il a rapporté avoir porté plainte pour «violences aggravées lors d’une manifestation sur la voie publique». Les deux circonstances aggravantes sont, selon lui, l’exercice de son métier de journaliste et une mission de service public.

Dans un mail envoyé le 23 novembre aux Gilets jaunes en Haute-Garonne, Yves Garrec, un des responsables du mouvement avait appelé à «respecter» les journalistes présents pour qu’ils puissent faire «leurs jobs» et sans lesquels «nous n’existerions pas médiatiquement».

Désormais, nous porterons plainte à chaque fois que ce type d’événements se produira

«Ces comportements sont intolérables», a réagi Céline Pigalle, directrice de la rédaction de BFMTV, sur le site de la chaîne d’informations en continu. «Désormais, nous porterons plainte à chaque fois que ce type d’événements se produira», a ajouté la responsable de la chaîne, qui avait déjà signalé des cas de menaces contre ses journalistes lors des rassemblements du week-end dernier.

Par ailleurs, deux journalistes du quotidien Midi Libre ont déposé plainte le même jour pour dégradation de l’agence de Béziers et des coups portés par des Gilets jaunes sur l’un d’eux.

via «BFM, collabos»: trois journalistes conspués à la mobilisation toulousaine des Gilets jaunes (VIDEO) — RT en français


«BFM menteurs !» : une cinquantaine de «gilets jaunes» protestent devant la rédaction de BFM TV

Latentes depuis des années, les critiques contre la presse trouvent un exutoire avec le mouvement des «gilets jaunes» et BFM TV, notamment, dont l’honnêteté journalistique est remise en question par les manifestants, devient la cible de leur colère.

D’abord concentré sur la hausse du prix des carburants, le mouvement des «gilets jaunes» est en train de changer de dimension pour exprimer un mécontentement beaucoup plus large envers le pouvoir. Et, pour beaucoup de manifestants, la presse, accusée de mal représenter le mouvement et de faire in fine le jeu du gouvernement, se retrouve sous le feu des critiques.

Ainsi, le 19 novembre au soir, une cinquantaine de «gilets jaunes» se sont rendus devant la rédaction de BFM TV pour y crier leur colère. Sous un concert de klaxons, les manifestants ont scandé à plusieurs reprises «BFM menteurs !», avant de huer des personnes sortant du bâtiment.

Une action qui fait écho à de nombreuses autres depuis le début du mouvement, où les journalistes de la chaîne d’information – et d’autres médias traditionnels – ont pu constater leur impopularité. «BFM c’est des experts de merde», avait par exemple lancé une personne en plein direct de la chaîne, le 17 novembre sur les Champs-Elysées.

https://twitter.com/Abbe_Rezina/status/1064901037469954048

Plus discret mais tout aussi parlant, un homme s’était placé dans le champ de la caméra avec un t-shirt détournant le logo de la chaîne : «BFMTG – Fake 24/7».

https://twitter.com/Othal78904638/status/1063841660726116353

Plus tard dans la soirée, c’est un autre journaliste qui était pris a parti à Paris, cette fois physiquement, lors de son duplex sur les Champs-Elysées. Alors qu’il couvrait l’évènement, un homme lui a écrasé un œuf sur la tête.

«Un climat général insupportable et injustifié», d’après BFM TV

Cette hostilité manifeste du mouvement envers la chaîne d’information a d’ailleurs contraint cette dernière à prendre des mesures de protection, comme l’a remarqué le site Puremedia. A la place du logo «BFM TV» habituellement visible, le micro des journalistes a souvent été anonymisé avec une simple bonnette noire. «Nous avons aussi des agents de sécurité qui escortent les reporters», a précisé au média Céline Pigalle, la directrice de la rédaction de BFM TV.

«Il y a un climat général insupportable et injustifié», a-t-elle par ailleurs jugé, estimant que «tout le monde [avait] de plus en plus de mal avec les faits». Selon elle, si BFM TV est accusée par les «gilets jaunes» de minimiser la mobilisation ou d’en rendre compte injustement, c’est parce que certains manifestants n’acceptent pas d’y entendre un propos différent de celui relayé sur les réseaux sociaux. Et d’en conclure de l’existence d’«une véritable bulle sur les réseaux sociaux».

via «BFM menteurs !» : une cinquantaine de «gilets jaunes» protestent devant la rédaction de BFM TV

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