Embargo du Qatar : l’Iran envoie des avions de produits alimentaires
L’Iran a envoyé cinq avions de produits alimentaires au Qatar à la suite de l’embargo imposé à cet émirat par l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et Bahreïn, a annoncé dimanche 11 juin Shahrokh Noushabadi, porte-parole de la compagnie Iran Air.
« Jusqu’à maintenant cinq avions chargés chacun d’environ 90 tonnes de produits alimentaires et de légumes ont été envoyés au Qatar. Un sixième doit partir aujourd’hui », a déclaré M. Noushabadi.
Par ailleurs, « 350 tonnes de produits alimentaires ont également été chargés sur trois petits bateaux » pour être envoyés au Qatar, selon Mohammad Mehdi Bonchari, le directeur du port de Dayyer (sud de l’Iran), cité par l’agence de presse Tasnim. Le port de Dayyer, dans la province de Bouchehr, est situé juste en face du Qatar.
L’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis (EAU), Bahreïn et l’Egypte ont rompu avec le Qatar lundi, dans le cadre d’une démarche coordonnée, accusant Doha, proche des Frères musulmans, de soutenir certains groupes fondamentalistes mais aussi l’Iran chiite, et provoquant la plus grave crise diplomatique dans le golfe arabo-persique depuis des années.
Contrat de 2,5 millions de dollars avec un cabinet américain
Les trois pays du Golfe ont coupé les liens de transit et donné aux Qataris deux semaines pour quitter leur territoire. Ce conflit diplomatique a séparé des familles et coupé des relations commerciales, suscitant l’inquiétude des travailleurs étrangers, notamment les Egyptiens, qui composent l’un des plus forts contingents d’expatriés au Qatar, quant à leur capacité à rester dans cet émirat.
A l’inverse, côté qatari, un communiqué ministériel diffusé ce week-end stipule qu’aucun changement n’a été décidé concernant les ressortissants des « pays frères et amis qui ont rompu ou réduit leurs relations diplomatiques, à la suite de campagnes malveillantes et hostiles envers le Qatar ».
Mais le gouvernement qatari s’active en coulisse et a fait appel au cabinet d’avocats d’un ancien ministre de la justice américain, John Ascroft, pour tenter de désamorcer la crise diplomatique avec ses voisins du Golfe et les Etats-Unis.
Le cabinet a conclu un contrat d’un montant de 2,5 millions de dollars et d’une durée de quatre-vingt-dix jours avec l’émirat, selon des documents remis au département (ministère) de la justice américain en vertu du Foreign Agents Registration Act, qui impose aux conseillers de clients étrangers de déclarer leurs activités.
Le Qatar cherche à démontrer l’authenticité de ses efforts en matière de lutte antiterroriste et à se conformer aux normes financières du Trésor américain. Le président américain, Donald Trump, a estimé vendredi que Doha soutenait historiquement le terrorisme « au plus haut niveau ».
La Russie a été samedi le dernier pays en date à appeler au dialogue pour éviter une escalade de la crise entre le Qatar et ses voisins du Golfe. « Nous sommes favorables à la résolution de tout désaccord par (…) le dialogue [car] nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une situation où les relations entre nos partenaires se détériorent », a déclaré le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, en recevant le ministre des affaires étrangères qatari, Cheikh Mohamed Bin Abderrahmane Al-Thani, qui effectue une tournée à l’étranger pour défendre la position du petit émirat.
« Conséquences humanitaires »
La rupture du Qatar avec ses voisins se concrétise par l’interruption des liaisons aériennes, maritimes et terrestres avec le petit émirat gazier qui importe une grande partie de ses produits consommés.
Amnesty International a averti samedi qu’en appliquant de telles mesures, Riyad et ses alliés « jouaient » avec la vie de milliers d’habitants du Golfe, séparant des familles et détruisant les moyens de subsistance et d’éducation d’une partie de la population.
Le secrétaire d’Etat américain, Rex Tillerson, a pour sa part appelé vendredi Riyad et ses alliés à alléger le blocus qui « a des conséquences humanitaires ». « Nous constatons un manque de nourriture, des familles sont séparées de force et des enfants sont retirés de l’école. Nous estimons que ce sont des conséquences involontaires, surtout pendant le mois sacré du ramadan, mais on peut y remédier immédiatement », a-t-il déclaré.
S’exprimant quelques heures plus tard, le président Donald Trump a cependant adopté un ton plus ferme vis-à-vis du Qatar, l’exhortant à arrêter « immédiatement » de financer « le terrorisme ». « La nation du Qatar, malheureusement, a historiquement financé le terrorisme à un très haut niveau », a-t-il accusé devant la presse à la Maison Blanche.
Soutien de la Turquie
Ces propos ont été salués samedi à Riyad tandis que l’ambassadeur émirati à Washington jugeait que M. Trump avait fait preuve de « leadership » dans ses propos contre Doha et « son soutien troublant à l’extrémisme ».
Le Qatar, qui héberge une immense base militaire américaine cruciale dans la lutte contre le groupe Etat islamique, a rejeté toutes les accusations formulées contre lui cette semaine.
« Le blocus (…) du Qatar est inacceptable », a dénoncé M. Al-Thani qui s’était rendu vendredi en Allemagne, puis à Bruxelles, où il a rencontré la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. Cette dernière a également appelé au « dialogue politique », notamment avec « les efforts de médiation » engagés par le Koweït, qui n’a pas rompu ses liens avec le Qatar.
En attendant, Doha peut compter sur le soutien affirmé de la Turquie qui continuera à aider le Qatar même si, a affirmé le président Recep Tayyip Erdogan, cela peut « gêner certains que nous soutenions nos frères et sœurs du Qatar (…), leur exportions de la nourriture, des médicaments, etc. ».
Lire aussi : La Turquie prend le parti du Qatar, mis au ban par Riyad et ses alliés
Recevant samedi le chef de la diplomatie de Bahreïn, M. Erdogan a appelé le Qatar et ses voisins à mettre un terme, « à ce problème avant la fin du mois du ramadan » autour du 25 juin.
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