« Depuis trois heures, une certaine amertume pointe dans les mots de cet homme qui estime ne pas avoir été entendu. Sa déposition spontanée détaille une accumulation de failles et de dysfonctionnements du renseignement et du judiciaire. Le 15 mars 2012, Christian Balle-Andui a demandé à avoir accès aux images de vidéo-surveillance de la tuerie de Montauban, ce qu’on lui refuse. […] Les failles du renseignement, le manque de coordination entre le niveau local et national sont au cœur du dossier Merah. »
Quand on lit cet extrait de l’article de L’Express, qui relate le procès en cours du frère de Mohamed Merah, on se dit qu’à ce niveau de responsabilités, l’« accumulation de failles et de dysfonctionnements » ne peut plus être un hasard. Un accident, c’est toujours possible. Deux, c’est louche, et plus, c’est carrément une politique.
Qui aujourd’hui peut acheter la version officielle du « terroriste » Merah ?
L’ancien patron du renseignement toulousain est revenu ce lundi sur les failles de l’affaire Merah. Il a évoqué sans le vouloir une information classée secret défense.
Il est arrivé avec une épaisse pochette beige sous le bras. À l’intérieur, des « notes », au cas où sa mémoire lui ferait défaut. Mais Christian Balle-Andui n’en a pas eu besoin ce lundi devant la cour d’assises spéciale de Paris. L’ancien directeur régional du renseignement intérieur toulousain au moment de l’affaire Merah ne mesure pas tout de suite la petite bombe qu’il vient de lâcher. C’est un avocat des parties civiles, maître Morice, qui le révèle.
« Si on vous avait écouté monsieur, on ne serait sans doute pas là aujourd’hui. Vous avez donné une indication qui ne figure pas au dossier », lance l’avocat. Le 15 mars 2012, jour de l’attentat de Montauban qui a coûté la vie à deux militaires, Christian Balle-Andui se remémore en effet avoir transmis à sa direction une note. Ce document comporte une douzaine de noms de djihadistes toulousains qu’il a identifiés et parmi lesquels se trouve selon lui le suspect. Parmi eux, celui de Mohamed Merah. Mais à ce moment précis, sa hiérarchie est sur la piste de l’ultra-droite. Son intuition restera sur des feuilles de papier.
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« Attitude inquiétante »
Avec le recul, ce fin connaisseur du terreau délinquant et salafiste local estime qu’il aurait pu « à 60% » identifier le tueur au scooter au vu de sa silhouette. Il aurait pu le mettre sous surveillance. Or, quatre jours plus tard, Mohamed Merah tue un adulte et trois enfants devant l’école juive Ozar Hatorah de Toulouse. Mohamed Merah aurait-il pu être arrêté plus tôt ? C’est toute la question qui transparaît dans sa déposition.
Dès le 15 juin 2011, il fait une première demande de judiciarisation concernant Mohamed Merah. Une procédure qui vise à transmettre les informations dont il disposait sur le futur tueur à la moto au procureur, afin qu’il évalue ces renseignements pour donner une suite, ou non. Une deuxième demande suivra le 29 juin. En vain, là aussi. Dans ses requêtes restées lettres mortes, l’ancien patron de la DDRI de Toulouse note l’« attitude inquiétante » du jeune des Izards.
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